Chapitre 3Évaluation de la fonction monoculaire

F. Audren

La fonction monoculaire regroupe toutes les capacités perceptives visuelles, à l’exclusion de celles nécessitant l’usage simultané des deux yeux (vision « binoculaire »). En clinique, l’évaluation de la fonction monoculaire regroupe tous les tests utilisés pour évaluer qualitativement et quantitativement la fonction visuelle. La grande majorité des examens utilisés en ophtalmologie clinique est destinée à l’exploration de la fonction monoculaire mais peut éventuellement être utilisée les deux yeux ouverts, ce qui peut sensiblement améliorer les performances. La pathologie strabique et l’amblyopie ont des conséquences sur la vision binoculaire mais également sur la fonction monoculaire, que ce soit au niveau sensoriel (acuité visuelle, vision des contrastes, champ visuel, etc.) ou moteur (fixation, anomalies optomotrices, conséquences sur la coordination).

À l’opposé, les tests de vision stéréoscopique, conçus pour être vus dans des conditions binoculaires, peuvent parfois être en partie perçus en condition monoculaire (faux positifs), et il faut connaître les limites de ces tests.

Évaluation clinique de la fonction monoculaire
ASPECTS SENSORIELS
ACUITÉ VISUELLE

L’acuité visuelle est définie comme le pouvoir de discrimination le plus fin au contraste maximal entre un test et son fond (MAR : angle minimum de résolution ; par exemple, l’angle sous lequel une branche d’un « E » de Snellen est sous-tendue, fig. 3-1). Elle teste la « vision centrale », de la rétine maculaire et voies optiques jusqu’au cortex visuel. La mesure de l’acuité est une mesure subjective, de seuil, et par convention elle est donnée quand au moins la moitié des symboles (optotypes) présentés sont perçus pour un angle donné. L’acuité visuelle maximale est limitée par l’espacement des cônes fovéolaires, qui est de 2,5 µm, ce qui donne une acuité visuelle maximale théorique de 30 secondes d’arc soit 20/10. Il faut considérer comme admis que les échelles d’acuité à utiliser doivent avoir une progression géométrique (logarithmique, comme l’échelle de Snellen, pour laquelle un écart de trois lignes correspond à un doublement de l’angle de résolution), dont le résultat peut être exprimé en logarithme de meilleure acuité visuelle (LogMAR), ce qui n’est pas le cas de l’échelle de Monoyer (arithmétique) qui est encore très répandue en France (tableau 3-1). L’échelle doit aller jusqu’à 20/10. L’acuité visuelle est testée de façon subjective (la coopération du sujet examiné est nécessaire). Elle peut être morphoscopique par la reconnaissance de formes, dessins, caractères (chiffres, lettres), faisant alors appel à des capacités cognitives (connaissance préalable de l’optotype et de sa dénomination), ou angulaire) (test d’orientation, comme le « E » de Raskin, l’anneau de Landolt) (fig. 3-2). Cette acuité visuelle testée en clinique courante est aussi appelée angle minimal de résolution. Il existe d’autres types d’acuités testables (tableau 3-II et fig. 3-3), qui ne sont pas utilisés en clinique courante.

Beaucoup plus rarement, la mesure est évaluée de façon objective par le biais d’examens électrophysiologiques (potentiels évoqués visuels avec stimuli structurés) ; ils ne nécessitent en théorie pas la coopération du patient mais leurs résultats peuvent souvent être sujets à caution — ce sont des extrapolations par rapport à des sujets normaux et les faux positifs et faux négatifs ne sont pas rares — et ils ont peu d’applications en clinique courante.

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Fig. 3-1 Le « E » de Snellen (1864), optotype qui, historiquement, a fondé la définition de l’acuité visuelle.

L’optotype vu sous un angle de 5 minutes d’arc correspond à un angle minimum de résolution (MAR) de 1 minute, soit une acuité visuelle de 0 LogMAR, 20/20 Snellen (à 20 pieds), 10/10 Monoyer.

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Tableau 3-I –  Correspondances entre acuité visuelle LogMAR, Monoyer (décimale), angle minimal de résolution (MAR) et gain d’efficience visuelle entre chaque ligne de LogMAR.

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Fig. 3-2 Exemple d’optotypes utilisés de nos jours pour la mesure de l’acuité angulaire (tests d’orientation).

Le « E » utilisé est le « E » de Raskin, souvent appelé à tort « E » de Snellen.

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Tableau 3-II –  Classification des types d’acuités visuelles en fonction des critères (d’après Westheimer, 2002 [4849]).

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Fig. 3-3 Configurations typiques des cibles qui explorent la capacité d’hyperacuité du système visuel (c’est-à-dire la détection de petites différences dans la localisation relative des éléments).

Les flèches indiquent la direction du déplacement qui dans chaque cas peut être appréciée sur quelques secondes d’arc dans des conditions optimales. De gauche à droite : détection du décalage de deux lignes verticales (Vernier) ; détection du décalage du sommet d’un chevron et d’une ligne ; détection du changement d’orientation d’une ligne ; détection du déplacement latéral d’une cible.

(D’après Westheimer, 2002 [4849].)

OPTOTYPES UTILISÉS CHEZ L’ENFANT

La mesure la plus précise de l’acuité visuelle repose sur des échelles fondées sur l’angle de résolution (échelles angulaires), comportant des optotypes comme le « C » de Landolt ou le « E » de Raskin. Les qualités intrinsèques de ce type d’échelles sont compensées chez l’enfant par leur « convivialité » médiocre (autant pour l’examinateur que pour l’enfant lui-même). De nombreuses autres échelles ont été élaborées pour l’enfant. Le plus souvent elles mesurent l’acuité visuelle de reconnaissance morphoscopique, généralement des dessins. L’avantage principal des dessins est de rendre l’évaluation plus attractive, ce qui peut être très précieux chez l’enfant. Il faut cependant ne jamais oublier que ces échelles dans leur grande majorité n’ont pas été rigoureusement validées scientifiquement — c’est-à-dire en termes de testabilité, reproductibilité, à la fois pour des enfants normaux et des amblyopes — et que les résultats qu’elles donnent ne sont pas superposables d’une méthode à l’autre. Ceci a pour conséquence que leurs résultats n’auront de valeur que si la mesure est faite dans les conditions standardisées du test pour au moins assurer une bonne reproductibilité d’un examen à l’autre. Ce type d’échelle pose aussi l’inconvénient qu’il sera abandonné en cours de suivi d’un traitement prolongé comme l’est celui de l’amblyopie, pour être remplacé par des optotypes comme des lettres ou des chiffres dès que l’enfant les connaît suffisamment.

L’échelle de Lea Hyvärinen, qui est assez répandue (Lea Symbols®) comprend quatre symboles qui ont des formes intermédiaires entre des lettres et des dessins (pomme, maison, rond, carré) [13] (fig. 3-4). Quand l’acuité du sujet examiné est inférieure à celle testée, les symboles ressemblent tous à un cercle. Cette échelle est sans doute, dans celles utilisant des dessins, celle qui est la plus satisfaisante et est facilement utilisable chez des enfants d’âge préscolaire, même si la plupart des études de validation ont été critiquées (notamment chez les patients amblyopes) [35].

L’utilisation d’une échelle comportant des lettres peut commencer chez des enfants de trois ans, en procédant par appariement tant que l’enfant ne connaît pas l’alphabet [12]. L’échelle doit idéalement comporter des lettres de lisibilité identique, être symétrique (défauts de latéralisation chez l’enfant de moins de quatre à cinq ans) et comporter des lignes horizontales, verticales et obliques (dépistage d’une amblyopie méridienne). Les lettres « H, O, T, V, U, X » remplissent ces exigences. La hauteur et la largeur de l’optotype doivent être cinq fois plus grandes que l’épaisseur du trait qui les constitue et qui est discriminant pour la reconnaissance de la lettre (à l’instar du « E » de Snellen ou du « C » de Landolt). Ces lettres « H, O, T, V, X, U » sont très utilisées dans les pays anglo-saxons comme dans le test de STYCAR (Sight Test for Young Children And Retardates) ou dans le protocole utilisé dans les études du PEDIG [12].

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Fig. 3-4 Échelle d’acuité visuelle Lea Symbols®.

(Avec l’aimable autorisation des laboratoires Good-Lite.)

OPTOTYPES GROUPÉS OU ISOLÉS

Les acuités visuelles mesurées par présentation d’optotypes isolés, en lignes ou groupés (lignes superposées) sont différentes en raison du phénomène d’interaction de contour, parfois dénommé crowding effect. Cette interaction de contour est maximale si la séparation entre les optotypes est d’environ la moitié du diamètre de l’optotype ; plus la distance est grande, plus on se rapproche des optotypes isolés et plus la reconnaissance est facile. De plus, l’optotype situé à l’extrémité de la ligne est plus facile à voir que ceux qui se trouvent au milieu de la ligne. L’interaction de contour est en général proportionnelle au niveau d’acuité visuelle [38]. L’espacement optimal entre deux optotypes (ou deux lignes) est égal à la taille globale de l’optotype. La présentation en utilisant cet effet permet un diagnostic plus sensible d’une baisse d’acuité visuelle en cas d’amblyopie, mais la mesure sur des échelles groupées rend plus difficile l’attention de l’enfant (distraction et interactions de bord).

Les meilleurs tests chez l’enfant, s’il est assez grand pour les réaliser, sont les échelles en ligne isolée ou les optotypes isolés entourés de barres, qui sont les meilleurs compromis entre facilité pour l’enfant et sensibilité pour le diagnostic d’une différence d’acuité visuelle en cas d’amblyopie [35]. Les meilleures échelles ont une reproductibilité chez l’enfant équivalente à celle utilisées chez l’adulte (0,1 LogMAR) [1220]. Un changement de 0,1 LogMAR entre deux visites peut donc être dû simplement à la fluctuation de la mesure. Si on utilise plusieurs modes de présentation, il faut le noter dans l’observation car un optotype vu de façon isolée ne représente pas la même acuité que des optotypes en ligne ou groupés (difficulté croissante).

DISTANCE DE LECTURE, ACUITÉ VISUELLE DE PRÈS

La distance de présentation de loin est 5 ou 6 m, sauf pour les petits enfants où elle doit être raccourcie (environ 3 m à trois ans). On tiendra compte de cette distance pour chiffrer l’acuité visuelle.

En France, les échelles de Parinaud pour l’adulte et de Rossano-Weiss pour les enfants sont les plus utilisées pour estimer l’acuité visuelle de près (leur progression est proche de la progression logarithmique). L’acuité visuelle de près, d’un point de vue purement optique, correspond à celle de lecture. L’élément principal est la distance de lecture, qui est spontanément de 18 cm chez l’enfant [24] ; le tableau 3-III permet de convertir l’acuité visuelle de près mesurée à des distances de lecture variables en Parinaud à 33 cm.

En cas d’amblyopie, une différence entre les acuités visuelles de loin et de près peut être observée (supérieure à une ligne, dans environ un tiers des cas, en faveur de l’acuité de près ou de loin dans une proportion équivalente) [6].

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Tableau 3-III –  Effet de la distance de lecture sur la notation de l’acuité visuelle de près (d’après Péchereau [28]).

ACUITÉ VISUELLE THÉORIQUE ET FACTEURS L’INFLUENÇANT

L’âge de l’enfant est un facteur essentiel influençant l’acuité visuelle :

  • à la naissance l’acuité visuelle est de 1/10 ;

  • à un an, elle atteint 2/10 à 3/10 (extrapolations à partir de potentiels évoquées avec des stimuli structurés et des cartes de Teller) ;

  • à quatre ans, elle est en moyenne de 5/10 ;

  • vers cinq à six ans, elle est de 10/10 ;

  • entre quinze et trente ans, elle est de 20/10.

Il est établi que cette évolution est plus lente en cas de pathologie, spécialement en cas d’amblyopie fonctionnelle : l’acuité de 10/10 est en effet atteinte vers l’âge de neuf ans sur le « bon » œil des enfants amblyopes (fig. 3-5) [43].

En raison des aberrations optiques du système optique oculaire, la dilatation pupillaire diminue la performance visuelle. Une fixation extrafovéolaire, quelle qu’en soit la cause, en raison des propriétés de la rétine, ne peut pas permettre une acuité visuelle optimale (la performance diminue en fonction de l’excentricité). L’erreur réfractive, par le flou induit ou l’instabilité de l’adaptation accommodative, diminue les performances.

Les qualités métrologiques du test d’acuité visuelle utilisé sont toujours à prendre en compte. Une faible luminance ne permet pas la stimulation des cônes mais seulement des bâtonnets, dont l’acuité ne dépasse pas 1,3/10. L’acuité visuelle est en théorie mesurée à contraste maximal et, quand il diminue, la résolution spatiale également. Pour une mesure correcte, le contraste ne doit pas être inférieur à 70 %. La durée d’exposition au test doit être supérieure à 500 millisecondes [24].

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Fig. 3-5 Acuité visuelle (logMAR) moyenne en fonction de l’âge (années) du bon œil chez des enfants amblyopes et chez des enfants non amblyopes.

MESURE DE L’ACUITÉ VISUELLE DE L’ENFANT EN PRATIQUE

Quelle que soit l’échelle utilisée, les conditions utilisées doivent toujours être les mêmes d’un examen à l’autre (éclairage, distance). La mesure doit être faite dans le calme en évitant au maximum les éléments distractifs (accompagnants, bruits, autres cibles visuelles d’intérêt, etc.). L’acuité visuelle peut être mesurée le plus souvent dès l’âge de deux ans et demi, parfois deux ans, mais il n’est pas rare qu’avant la scolarisation aucune mesure ne soit possible, l’enfant étant trop timide, opposant, ou ne sachant répondre ; pour ces raisons, cette mesure est difficile.

Chez les enfants les plus petits, on commencera par tester l’acuité de près, puis de loin, en binoculaire, puis en monoculaire. On commence généralement par s’assurer sur de gros optotypes la compréhension du test et la connaissance des optotypes. Le temps de présentation doit être adapté à l’enfant. On notera toujours le type d’échelle utilisé, la présentation (isolée, groupée) et le mode de réponse (appariement, dénomination), si l’acuité est monoculaire, binoculaire, et le côté testé le premier. Lors de la première visite, en particulier s’il s’agit d’une consultation de dépistage, il faut savoir ne pas s’acharner si l’enfant ne répond pas ou s’il s’arrête en cours d’examen, au risque de compromettre les mesures des visites suivantes. On donnera éventuellement une feuille photocopiée avec les symboles pour que l’enfant s’exerce à la maison en vue de la visite suivante.

On commence toujours par mesurer l’acuité de l’œil amblyope en premier et on sera extrêmement vigilant sur les risques de tricherie (notamment avec les montures d’essai ou entre les doigts de la main qui cache le bon œil), en n’hésitant pas à recourir à un pansement sur un œil si nécessaire si l’enfant l’accepte. Il faut toujours être attentif et connaître l’échelle d’acuité visuelle qu’on utilise, l’enfant pouvant mémoriser les dessins éventuellement proposés s’ils sont peu nombreux.

L’examinateur doit aussi savoir gérer son interaction avec l’enfant : il faut surveiller le comportement de l’enfant pour être sûr qu’il n’y a pas de tricherie, mais il doit aussi regarder les planches d’acuité pour stimuler l’attention de l’enfant, tout en l’encourageant de façon emphatique — si l’examinateur ne fait que regarder l’enfant, celui-ci aura aussi tendance à le regarder fixement…

ACUITÉ VISUELLE PAR RÉSEAUX

Le Bébé-Vision (ou les cartes de Teller) teste une acuité angulaire en utilisant la technique du regard préférentiel, utilisable chez les enfants d’âge préverbal. Ces tests reposent sur la capacité à percevoir les contrastes entre deux zones de luminosité différente. L’acuité est définie par l’écartement de bandes alternantes blanches et noires, exprimée en cycles par seconde. L’examinateur utilise un petit théâtre et est derrière le carton présentant le stimulus sur la moitié de celui-ci et une surface uniforme grise de même tonalité sur l’autre moitié. Cette technique utilise la méthode du regard préférentiel, à savoir que l’enfant est attiré par un test structuré plutôt que par une plage uniforme de même tonalité. L’examen comparatif entre les deux yeux permet de mettre en évidence une éventuelle asymétrie de réaction. Les tests utilisables sont dérivés des cartons de Teller. La présentation des bandes peut être linéaire ou concentrique. Leur valeur est discutée et ils n’ont pas d’utilité réelle dans le cadre de l’amblyopie fonctionnelle ou du strabisme, où leur sensibilité et leur spécificité pour le diagnostic d’une amblyopie sont mauvaises [37]. Ils peuvent cependant avoir un intérêt dans le suivi d’amblyopies organiques.

CAS PARTICULIER DE L’ÉVALUATION DE L’ACUITÉ VISUELLE EN RECHERCHE CLINIQUE

Chez l’adulte, l’échelle logarithmique est la règle, notamment les échelles ETDRS (Early Treatment of Diabetic Retinopathy Study), qui se présentent sous la forme de panneaux de luminance standardisée, à utiliser dans l’obscurité, à une distance standard (4 ou 5 m en général). Cette échelle permet l’établissement d’un score (somme des optotypes reconnus). Cette méthode a deux principaux avantages qui sont la reproductibilité du score d’une part, et la possibilité de tester des acuités très basses (en se rapprochant de l’échelle à 1 m) d’autre part. La spécificité dans ces conditions est de 96 % pour une différence entre deux scores de dix lettres (soit deux lignes), ce qui signifie qu’une différence de dix lettres a 96 % de chance d’être une modification réelle de l’acuité (et non une fluctuation liée à la méthode de mesure) [32].

Chez l’enfant, il existe beaucoup d’échelles de mesure d’acuité. À notre connaissance, seules les méthodes d’évaluation décrites par le groupe du PEDIG (Pediatric Eye Disease Investigator Group1) sont rigoureusement validées [5-8, 1220]. Ces techniques, inspirées des méthodes ETDRS, sont adaptées aux enfants en tenant compte de leur fatigabilité : un seul optotype est présenté à la fois sur un moniteur, entouré de barres, ce qui augmente la sensibilité pour la détection d’une amblyopie fonctionnelle (fig. 3-6). La mesure de l’acuité est faite selon un protocole précis, qui a lieu en plusieurs temps :

  • première approximation de l’acuité en montrant une lettre par niveau d’acuité (technique de seuil) ;

  • test de l’acuité plus précise, avec plusieurs optotypes par niveau d’acuité, échec à un niveau dès que deux lettres ne sont pas vues correctement (fig. 3-7) ;

  • phase de renforcement en présentant une lettre par niveau d’acuité en recommençant trois niveaux plus bas que le niveau échoué dans la phase 1 ;

  • test d’acuité précise avec arrêt dès que deux lettres ne sont pas lues.

De sept à treize ans, les optotypes sont les mêmes que ceux utilisés dans les échelles ETDRS et le résultat peut s’exprimer en équivalent Snellen, en LogMAR ou en score [8].

Entre trois et sept ans, le principe est le même, mais seuls quatre optotypes sont utilisés (« HOTV »), nommés ou désignés par appariement. Les résultats sont consignés sur une fiche type (fig. 3-8, et sont exprimés en équivalent Snellen ou en LogMAR. En employant cette technique, la spécificité est la même que pour le score ETDRS chez l’adulte (96 % pour une différence de deux lignes) [12].

Pour mémoire : L’acuité visuelle « de mouvement » et l’acuité visuelle « de texture » ne sont pas d’évaluation courante et nécessitent un appareillage adapté [48].

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Fig. 3-6 Exemple d’optotype utilisé dans les études du PEDIG.

(D’après Holmes et al., 2001 [12].)

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Fig. 3-7 Stratégie de mesure de l’acuité visuelle E-ETDRS (Electronic-Early Treatment for Diabetic Retinopathy Study).

La mesure commence par une phase de dépistage pour déterminer un seuil approximatif d’acuité visuelle. Cette phase est suivie par le test du seuil pour déterminer le niveau supérieur d’acuité où 5 lettres sur 5 sont correctement identifiées.

Avertissement : les auteurs parlent en acuité visuelle LogMAR (10/10 = 0 ; 1/10 = 1 ; 20/10 = – 0,3) : un niveau plus élevé correspond à une acuité visuelle plus basse en 1/10 (diminution de la performance) et inversement.

(D’après Beck et al., 2003 [4].)

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Fig. 3-8 Fiche de score utilisée pour enregistrer les résultats des tests dans le protocole de mesure de l’acuité visuelle. Un exemple d’acuité visuelle de 20/30 est montré.

(D’après Holmes et al., 2001 [12].)

SENSIBILITÉ AUX CONTRASTES

La sensibilité aux contrastes est la capacité du système visuel à détecter des différences de luminance (« intensité lumineuse »). Son évaluation nécessite des conditions d’application strictes et un matériel adapté : échelles papier de type Pelli-Robson (fig. 3-9) [40] ou moniteur, sur lequel sont présentés différents réseaux de fréquence spatiale variable. Chaque réseau est d’abord présenté à très faible contraste puis le contraste est augmenté progressivement, le sujet examiné doit presser un bouton de réponse dès qu’il perçoit les barres du réseau. Plus précis que les échelles papiers, ce dernier dispositif permet d’établir la courbe de fonction de sensibilité aux contrastes (fig. 3-10).

La courbe de sensibilité aux contrastes peut être influencée par différents facteurs, dont la réfraction qui, si elle est inadaptée, entraîne une baisse de sensibilité sur les hautes fréquences spatiales, ou des pathologies, comme les neuropathies optiques qui peuvent donner une baisse de sensibilité sur les basses fréquences spatiales alors que l’acuité visuelle est préservée.

De multiples études se sont penchées sur les déficits de la fonction visuelle observés en cas d’amblyopie fonctionnelle. Rappelons que celle-ci est définie comme une baisse d’acuité visuelle (telle que définie précédemment) d’origine corticale, mais d’autres aspects de la fonction visuelle sont altérés, notamment la sensibilité aux contrastes. Les causes de l’amblyopie fonctionnelle sont connues : trouble réfractif, strabisme, association des deux. Les tentatives de relier certains des déficits observés à ces types d’amblyopie ne sont pas concluantes et chaque amblyopie peut être caractérisée différemment en fonction des paramètres étudiés (acuité visuelle, acuité Vernier, acuité par réseaux, sensibilité aux contrastes…) [19]. En cas d’amblyopie, il existe une corrélation entre les différents types d’acuité ; en revanche, la baisse de la sensibilité aux contrastes est une fonction en partie indépendante de l’acuité visuelle. Ceci a pu conduire à une caractérisation des amblyopies en fonction de ces deux paramètres (fig. 3-11). Ceci illustre la variabilité interindividuelle des déficits sensoriels (de pathogénie complexe) rencontrés dans l’amblyopie fonctionnelle. Notons aussi que le traitement de l’amblyopie (par occlusion) agit sur toutes ces composantes de façon variable, avec une amplitude de gain plus importante sur les paramètres les plus détériorés avant le traitement (par exemple, amélioration plus importante de la sensibilité aux contrastes que de l’acuité visuelle si cette première est plus altérée au départ) [34].

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Fig. 3-9 Échelle de vision des contrastes Pelli-Robson.

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Fig. 3-10 Sensibilité aux contrastes pour le système visuel.

(D’après Oyster, 1999 [27].)

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Fig. 3-11 Localisation moyenne des onze catégories cliniques définies dans un espace à deux dimensions : composante 1 : acuité visuelle ; composante 2 : sensibilité aux contrastes.

Les sujets sans vision binoculaire avec des baisses d’acuité visuelle légères à modérées ont en moyenne une meilleure sensibilité aux contrastes que les sujets avant une vision binoculaire avec une acuité équivalente.

(D’après McKee et al., 2003 [18].)

AUTRES ASPECTS SENSORIELS
INTÉGRATION DU CONTOUR

La perte de la perception du contour, c’est-à-dire la perte de la perception des contours comme continus, s’explore par des tests spécifiques (mires de Gabor). C’est un sens qui met plus de temps à se développer que l’acuité visuelle. Elle est aussi dénommée mesure de « second ordre » de l’amblyopie, dans laquelle elle peut être altérée, sans que cela s’explique seulement par les niveaux d’acuité visuelle ou de la sensibilité aux contrastes [35].

CHAMP VISUEL

Le champ est défini comme l’étendue de l’espace que l’œil immobile peut embrasser autour du point de fixation. Il existe différent type de mode d’évaluation du champ visuel : manuel (Goldmann) ou automatisé (Humphrey, Octopus), statique (automatisés) ou cinétique (Goldmann) (en fonction du stimulus). Lorsque ces tests ne sont pas disponibles ou utilisables, on peut évaluer le champ visuel au doigt (champ visuel de confrontation) ou en demandant au patient de dessiner un éventuel déficit (grille d’Amsler).

Dans le contexte de l’amblyopie fonctionnelle, la réalisation d’un champ visuel standard n’a pas beaucoup d’intérêt (une altération majeure de celui-ci devra faire se poser la question d’une anomalie organique). Les seules anomalies retrouvées sur le champ visuel standard sont des baisses de la sensibilité dans la région centrale [36].

En revanche, l’exploration plus fine de la perception dans l’ensemble du champ visuel, par des réseaux sinusoïdaux de fréquences spatiales, orientations et contrastes variables, en comparant les deux yeux, peut aider à mettre en évidence la perception subjective des stimuli, qui prennent des formes variées, témoignant de la désorganisation spatiale du percept de l’œil amblyope (cf.  fig. 6-31 au chapitre 6) [3].

Il existe plusieurs hypothèses explicatives concernant la distorsion qui caractérise l’amblyopie strabique :

  • il pourrait s’agir :

    • d’un « sous-échantillonnage » de l’image, comme si des zones de champ visuel se comportaient comme des filtres grossiers ;

    • d’une projection spatiale « brouillée » ;

    • d’un mélange des deux ;

  • il pourrait également s’agir d’une mauvaise représentation de type « diplopie », comme si un seul réseau était perçu à deux orientations différentes et, parfois, à deux fréquences spatiales différentes [35].

VISION DES COULEURS

Les tests de vision des couleurs les plus utilisés en clinique courante sont des tests comprenant des pigments capables de réémettre des longueurs d’onde précises, d’énergies précises, donnant des tonalités de même luminosité. Ils doivent être éclairés par une lumière calibrée (équivalente à la lumière du jour). On parle de « tests pigmentaires ». Chacune des tonalités du test est choisie avec précision tout le long du spectre visible, de telle sorte qu’elles puissent être confondues deux à deux par les sujets atteints de déficience de la vision des couleurs [31]. On distingue deux types de tests : les tests d’alignement de pions colorés (les plus répandus étant les panels 15 Hue saturé et 15 Hue désaturé) et les planches pseudo-isochromatiques (la plus connue étant le test d’Ishihara). Ces dernières sont réservées au dépistage et au diagnostic des dyschromatopsies congénitales, les premières pouvant étudier les anomalies congénitales ou acquises [31].

En cas d’amblyopie, ces tests ne révèlent généralement pas d’anomalie mais, avec des tests plus sensibles (100 Hue), on peut mettre en évidence des anomalies du sens coloré non liées à l’acuité visuelle et ne dépendant pas du type d’amblyopie [15].

La voie magnocellulaire répond mieux aux stimuli achromatiques de basse fréquence spatiale et de haute fréquence temporelle et au mouvement, alors que la voie parvocellulaire répond mieux aux stimuli chromatiques de haute fréquence spatiale et de basse fréquence temporale. C’est la voie parvocellulaire qui code la vision des couleurs et, par des tests psychophysiques (réseaux colorés), on peut également mettre en évidence une baisse du sens coloré à la fois sur l’œil amblyope et sur le « bon » œil en cas d’amblyopie strabique [9], alors que la vision des contrastes (achromatique) est quant à elle diminuée pour l’œil amblyope et augmentée pour l’œil adelphe. Ces tests ne sont pas de réalisation courante.

SENSIBILITÉ AU MOUVEMENT, RÉPONSE TEMPORELLE

En cas d’amblyopie, le temps de réaction à un stimulus (prise de conscience d’un stimulus visuel, déclenchement des saccades, réflexe photomoteur) est allongé par rapport à la normale, notamment pour les hautes fréquences spatiales. La discrimination du mouvement et de la vitesse est aussi altérée [35]. L’étude de ces paramètres n’est pas de réalisation courante.

ANOMALIES DU « BON ŒIL » EN CAS D’AMBLYOPIE FONCTIONNELLE

La vision du « bon œil » en cas d’amblyopie est supposée être normale. Mais on a déjà vu que l’acuité visuelle progressait plus lentement chez les enfants amblyopes et que d’autres anomalies sensorielles peuvent être identifiées sur cet œil, même si elles ne sont pas recherchées en routine (anomalie de l’acuité Vernier, incertitude spatiale, traitement du mouvement, petits déficits de la sensibilité aux contrastes, déficits de la détection des contours aux mires de Gabor). Inversement, l’œil non amblyope peut parfois avoir une meilleure acuité visuelle pour les échelles en bas contraste, à basse luminance.

ASPECTS MOTEURS

Les aspects moteurs de la fonction monoculaire sont ici à comprendre comme les caractéristiques sensorimotrices de la fonction monoculaire. Le principal corollaire de la fonction visuelle monoculaire est la fonction de fixation. Nous évoquerons également les conséquences de l’amblyopie sur la motilité oculaire et sur la coordination visuomotrice.

PRÉFÉRENCE DE FIXATION

L’étude de la préférence de fixation est une méthode d’appréciation de la prépondérance fonctionnelle d’un œil par rapport à l’autre en cas de déviation strabique. L’évaluation est réalisée en faisant fixer le patient avec ses deux yeux ouverts, sur une cible accommodative. L’œil fixant est alors temporairement occlus pour forcer la fixation de l’œil non préféré. Quand la fixation l’occlusion est prise par l’œil non préféré, l’occlusion est levée et la période pendant laquelle la fixation est maintenue par cet œil est notée ; la préférence de fixation peut être classée en quatre grades :

  • pas de préférence de fixation (le patient alterne spontanément) ;

  • préférence de fixation légère (le patient préfère fixer avec un œil, mais peut changer d’œil fixateur, souvent avec un clignement) ;

  • préférence de fixation modérée (le patient préfère fixer avec un œil, mais peut tenir la fixation sur son œil non préféré jusqu’au premier clignement) ;

  • forte préférence de fixation (le patient préfère fixer avec un œil et ne peut maintenir la fixation avec l’autre œil) [11].

L’étude de la préférence de fixation a un intérêt dans l’étude de tout strabisme et peut guider les traitements (occlusion alternée, par exemple), mais la sensibilité (53 %) et la spécificité (38 %) de ce test pour diagnostiquer une amblyopie font qu’il n’a aucun intérêt pour juger de la fonction monoculaire [1].

FIXATION MONOCULAIRE

Il a été montré depuis des décennies que l’œil amblyope (en condition monoculaire) pouvait avoir une fixation non fovéolaire [2]. Cet élément clinique a eu une grande importance dans les années cinquante et soixante quand cette fixation était un élément de suivi lors de certains types de rééducation orthoptique (comme la rééducation pléoptique, qui n’a plus cours). Les pratiques actuelles ont un peu relégué l’étude de la fixation au rang d’accessoire :

  • il ne s’agit plus d’un élément déterminant de la prise en charge thérapeutique, une fixation excentrique étant un facteur de mauvais pronostic de récupération d’une amblyopie, mais pas une contre-indication au traitement ;

  • surtout, l’étude précise de la fixation (hors cas extrême de fixation extramaculaire) nécessite des patients suffisamment coopérants donc suffisamment âgés : aujourd’hui, le consensus est de prendre en charge les patients le plus précocement possible, ce qui limite probablement le nombre d’amblyopies résiduelles avec anomalies de fixation chez des patients suffisamment âgés pour qu’elles soient encore constatées [44].

Comment examiner la fixation ?

L’examen de la fixation se fait au visuscope (ophtalmoscope projetant une petite étoile que le patient doit fixer), réglé avec une luminosité modérée, l’autre œil étant occlus. Pendant que l’examinateur aperçoit la rétine, il est demandé au patient de regarder l’étoile (qui doit être suffisamment grande pour que l’œil amblyope puisse la voir). L’examinateur peut ainsi observer la position de la projection de l’étoile sur la rétine et sa position par rapport à la fovéola.

Remarque : Bien souvent, les ophtalmoscopes actuels ne sont pas munis d’une simple étoile mais de grilles entourant le point de fixation, grilles qui peuvent gêner l’examen [33].

Résultats

La fixation de l’œil amblyope peut être centrale, stable, fovéolaire, c’est-à-dire que la fovéola est alignée sur la direction visuelle principale. En cas d’amblyopie, elle peut être excentrique : juxtafovéolaire, instable, variable selon la direction du regard, ou franchement excentrique (paramaculaire, extramaculaire, péripapillaire ou temporale). Plus exceptionnellement, il y a une absence de fixation (« afixation »), qui ne se verrait que chez le petit enfant en cas d’amblyopie fonctionnelle et évoluerait éventuellement vers une fixation excentrique en l’absence de traitement. On comprendra aisément que cet examen est nécessairement un peu grossier chez le petit enfant, notamment en cas de fixation juxtafovéolaire, et ne sera pas un élément fiable pour le diagnostic d’une éventuelle microtropie associée à une amblyopie réfractive. Dans les cas difficiles, on pourra s’aider en comparant l’aspect fundoscopique des deux yeux. Le bon œil, en cas d’amblyopie strabique, peut aussi présenter des anomalies comme une fixation extrafovéolaire, une instabilité de fixation [35].

Comment interpréter les résultats

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer les anomalies de fixation observées en cas d’amblyopie :

  • l’hypothèse du scotome, où un scotome fonctionnel fovéolaire serait la cause de la fixation excentrique ;

  • l’hypothèse de la correspondance, où la fixation excentrique se développerait de façon similaire aux anomalies de correspondance rétinocorticale observées en cas de déviation strabique, et en serait un stade plus sévère, de même que l’amblyopie est un stade ultime, monoculaire, de la neutralisation en cas de strabisme.

Il existe des arguments cliniques en faveur et contre ces deux hypothèses.

Certains éléments doivent être notés : d’une part, il existe une mauvaise corrélation entre l’acuité visuelle mesurée et la fixation — c’est-à-dire qu’on ne pourra naturellement pas observer une acuité visuelle normale en cas de fixation excentrique (en raison des propriétés de résolution spatiale de la rétine) mais que, pour une même acuité visuelle (basse en raison d’une amblyopie fonctionnelle), on pourra observer tous les types de fixation (y compris fovéolaire) — ; d’autre part, plus la fixation se fera à distance de la fovéola, plus elle sera instable, comme l’illustre la figure 3-12. Il est également intéressant de connaître l’impression subjective du patient par rapport à la cible :

  • cette fixation excentrique de l’œil amblyope strabique peut correspondre à une vraie fixation excentrique, c’est-à-dire que la localisation « droit devant » a dérivé de la fovéola à une zone rétinienne excentrique et que le patient perçoit comme « droit devant » l’objet qu’il fixe de façon excentrique ;

  • inversement, si l’image fixée excentriquement reste perçue « sur le côté », ceci signifie que la fovéa a gardé sa localisation « droit devant » et on parle alors de vision excentrique [44].

Cette seconde éventualité est aussi ce qui se rencontre en cas de scotome acquis, alors que la première témoigne d’une désorganisation du percept de l’œil amblyope et de la hiérarchie rétinienne spatiale. La rétine peut être en effet considérée comme un référentiel spatial où la fovéola est le point zéro (en condition physiologique), ce qui n’est plus le cas s’il existe une vraie fixation excentrique.

On peut facilement rapprocher ces anomalies de la fixation des distorsions subjectives du champ visuel [3].

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Fig. 3-12 Photographies de trois patients amblyopes. Les différentes localisations de la fixation sur neuf à douze photographies consécutives sont représentées sur les photographies de cette figure. Remarquer l’augmentation de la dispersion lorsque l’excentricité augmente. Les trois patients avaient une acuité visuelle de 6/60 malgré une grande différence du schéma de fixation.

a. Fixation fovéolaire. b. Fixation parafovéolaire. c. Fixation excentrique, périphérique. Chaque cercle représente une fixation durant laquelle une photographie est prise.

(D’après von Noorden et al., 1962 [45].)

ANOMALIES OCULOMOTRICES OBSERVÉES EN CAS D’AMBLYOPIE

Les mouvements de version correspondent aux déplacements conjugués des globes en parallèle. Les trois types fondamentaux de version sont les saccades, la poursuite et le nystagmus optocinétique. L’induction optomotrice (induction oculomotrice induite par les stimuli visuels), dans les conditions physiologiques, est d’une extrême précision quelles que soient les conditions de fixation (binoculaire ou monoculaire). L’induction optomotrice est liée à l’organisation spatiale de l’ensemble des zones rétiniennes centrées sur la macula. Nous avons évoqué précédemment la notion de hiérarchie rétinienne spatiale, dont la fovéola est le point zéro pendant la situation de fixation, mais également dans le mouvement dans tous les cas d’induction optocinétique.

Tout comme on peut observer des anomalies de fixation s’il existe une amblyopie strabique, les inductions optomotrices peuvent être perturbées en cas d’amblyopie, avec anomalies des poursuites, des saccades, du nystagmus optocinétique, avec mouvements anarchiques (retardés, ralentis, imprécis, saccades de rattrapage mal calibrées, etc.) — ceci surtout en cas de fixation excentrique (mais pas exclusivement) —, alors qu’en revanche les inductions optomotrices sont conservées en cas de scotome acquis ou de paralysies oculomotrices. En cas d’amblyopie, ces anomalies sont mal corrélées avec l’acuité visuelle, mais le sont plus avec les anomalies de fixation [2946]. « L’amblyopie (…) bouleverse de telle façon l’organisation spatiale perceptive qu’elle pervertit l’induction motrice » [29]. Ces anomalies constituent le versant moteur conséquence des distorsions perceptives évoquées précédemment [3].

CONSÉQUENCES FONCTIONNELLES DE L’AMBLYOPIE

Les études portant sur les retentissements fonctionnels de l’amblyopie ont souvent été impuissantes à mettre en évidence un retentissement de celle-ci sur des activités particulières, faute de méthodologie adaptée et en raison des stratégies de compensation développées spontanément par les patients [35]. Ces stratégies vont en partie compenser des anomalies présentes non seulement quand c’est l’œil amblyope qui assure la vision, mais également en binoculaire ou quand l’œil dominant assure la vision.

ANOMALIES DE LA COORDINATION

Des anomalies de la motricité fine sont été retrouvées chez les sujets amblyopes [47], mais c’est le retentissement de l’amblyopie sur la coordination œil-bras-main qui a fait l’objet des plus nombreuses études. Des études de cinématique (tracking en trois dimensions) de mouvements d’approche et de préhension d’objets ont mis en évidence des anomalies chez les patients amblyopes (cf.  fig. 6-32 et 6-33 au chapitre 6). Grant et al., chez des adultes présentant différents types d’amblyopies, ont montré que les mouvements étaient plus lents et comportaient plus d’erreurs lorsque la vision était assurée par l’œil amblyope ; cependant, les mouvements étaient comparables à ceux des sujets contrôles quand les patients utilisaient l’œil non amblyope ou en condition binoculaire [10]. Ces anomalies ne touchaient que peu la phase initiale d’approche et de formation de la pince, précédant le contact avec l’objet (résultat de la programmation du mouvement), malgré la mauvaise vision ; en revanche, ils présentaient de nombreuses erreurs en condition binoculaire et monoculaire avec l’œil amblyope dans leur approche finale de l’objet et lors de la fermeture de la main et la préhension. Ces anomalies étaient proportionnelles à la profondeur de l’amblyopie, mais les auteurs tiennent pour cause principale de ces anomalies l’absence de vision binoculaire.

La même équipe a réalisé le même type d’étude chez des enfants amblyopes de quatre à huit ans, des enfants normaux de cinq à onze ans et des adultes [39]. Les enfants les plus jeunes (cinq à neuf ans) du groupe contrôle utilisaient une stratégie surtout programmée et heurtaient plus souvent les objets à saisir en monoculaire, alors que les enfants plus âgés (neuf à onze ans) incorporaient progressivement un rétrocontrôle visuel pour guider l’atteinte et finalement la saisie de l’objet, avec un avantage binoculaire pour les deux phases du mouvement ressemblant à ce qui est observé chez l’adulte. Chez des enfants amblyopes, les mouvements étaient également plus lents et comportaient plus d’erreurs, et ceci dans toutes les conditions, binoculaire et monoculaire, et même quand l’œil dominant assurait la vision. En particulier, il leur fallait beaucoup plus de temps pour l’approche des objets et ils faisaient beaucoup plus d’erreurs lors de la position de la pince, ces anomalies étaient plus prononcées chez les enfants ayant les performances binoculaires les plus faibles, quelle que soit la sévérité de leur amblyopie. Ceci suggère que l’importance de la vision binoculaire pour la coordination œil-main augmente avec l’âge et le guidage du mouvement.

On voit donc que les anomalies notées chez l’enfant liées à l’incertitude spatiale due à l’amblyopie ne sont en partie plus présentes chez l’adulte. Cette disparition serait due à des stratégies de compensation visuomotrices (planification plus lente, augmentation des saccades au moment de l’atteinte de l’objet notamment [2122]).

Pour finir, ajoutons que des études récentes ont montré que l’effet de l’amblyopie n’est pas présent que sur le contrôle du mouvement, mais également sur sa programmation (et la partie initiale des mouvements d’approche-préhension), ceci dans toutes les conditions binoculaire et monoculaire, et même quand l’œil dominant assure la vision, toujours en raison de la distorsion spatiale liée à l’amblyopie, mais que la qualité de la compensation de ces anomalies par la vision pendant le mouvement est corrélée à l’acuité visuelle de l’œil amblyope [23].

ANOMALIES DE LA LECTURE

La vitesse de lecture est plus lente chez les amblyopes que chez les sujets normaux, que ce soit en binoculaire ou monoculaire, même si l’œil dominant assure la vision. Pendant la lecture, les sujets amblyopes font plus de saccades de retour en arrière. Ils ont des temps de fixation plus longs mais avec des amplitudes de saccades normales [14]. Ces anomalies de la fixation et des saccades pendant la lecture seraient des stratégies de compensation des anomalies perceptives associées à l’amblyopie. Citons quelques chiffres de l’étude de Kanonidou et al. à titre d’exemple : la vitesse de lecture, exprimée en caractères par seconde, est en monoculaire de 13 et 16 en cas de lecture par l’œil amblyope et l’œil non amblyope respectivement, pour une normale à 22, et en binoculaire de 16 pour les patients amblyopes pour une normale à 23 [14].

Perception du relief
ASPECTS MONOCULAIRES DE LA PERCEPTION DU RELIEF

Par perception du relief, on sous-entend souvent « vision stéréoscopique » (au sens de la stéréopsie fine comme elle est testée en clinique). En réalité, il existe de nombreux éléments visuels, de nombreux indices perçus en monoculaire qui suggèrent la profondeur (fig. 3-13). Ces éléments ont été employés depuis des siècles, au moins dans la peinture occidentale, pour suggérer le relief sur les supports en deux dimensions. Les illustrations utilisant différents modes de perspective, de diminution, de chevauchement, aérienne ou géométrique sont innombrables. Si on distingue conceptuellement assez facilement ce qui est élément monoculaire de perspective et vision stéréoscopique fine (binoculaire), dans la vie courante ces éléments sont intriqués et dépendant les uns des autres — l’effet de texture, par exemple, n’est pas moins important que la disparité pour percevoir le volume d’un objet.

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Fig. 3-13 Perception du relief en monoculaire.

Les lettres marquent des signaux individuels : a, b : taille apparente ; c, d : vision floue ; e, f ; interposition ; g, perspective aérienne ; h, ombre ; i perspective géométrique ; c, d, vitesse relative et sensation de vitesse. Encart i : parallaxe du mouvement. La fixation est à une distance intermédiaire et la tête est déplacée sur la gauche. Les objets le plus près se déplacent en sens opposé (vers la droite) et les plus loin dans le même sens (vers la gauche), analogue à la disparité croisée et décroisée.

(D’après Tychsen, 1992 [42].)

FAUX POSITIFS DES TESTS DE VISION STÉRÉOSCOPIQUE

Un aspect important de la vision monoculaire à ne pas méconnaître concernant la vision du relief est celui de la vision stéréoscopique ou plus exactement de la valeur des tests de stéréopsie en pratique clinique dans des conditions monoculaires, ou les deux yeux ouverts, mais dans des conditions n’autorisant pas la vision stéréoscopique (déviation strabique). Paradoxalement, cet aspect n’a pas été très étudié [1725]. Nous citerons particulièrement l’étude de Leske et al. [17], qui considèrent les réponses de sujets normaux et strabiques à différents tests de vision stéréoscopique. Les résultats de cette étude doivent être connus. Sur cinquante-deux patients présentant un strabisme avec un angle supérieur à 20 d, les réponses étaient les suivantes (faux positifs) :

  • Titmus test : test perçu pour la mouche dans 6 % des cas, les animaux dans 10 % des cas (jusqu’à trois animaux), les cercles dans 35 % des cas (jusqu’à quatre cercles) ;

  • Randot test (jusqu’à 800’’) : test perçu dans 10 % des cas ;

  • Frisby test : jamais perçu.

Un des résultats intéressants de cette étude est également qu’en cas de déviation des axes visuels de plus de 4 d, il est très peu probable que les patients présentent une stéréopsie réelle.

Concernant les tests de Lang, très répandus, les faux positifs du test de Lang I ne seraient pas rencontrés (dans des conditions d’application rigoureuse de ce test) [741], alors qu’ils sont fréquents avec le test de Lang II (20 % à 30 % des cas) [2730].

Insistons sur le fait que les études ayant étudié ces tests respectaient scrupuleusement leurs règles d’utilisation — c’est-à-dire aucun mouvement de la tête ou du test pendant l’examen — et qu’en pratique quotidienne, dès que ces conditions ne sont pas respectées, les résultats peuvent être sujets à caution.

Conclusion

La fonction monoculaire est riche, performante mais les moyens cliniques d’exploration utilisés couramment sont finalement limités (l’acuité visuelle ne teste que la vision centrale, avec un contraste maximal noir sur blanc). L’amblyopie fonctionnelle est défi nie par une acuité visuelle anormalement basse, mais cette définition n’inclut qu’un paramètre parmi des altérations sensorielles complexes qui ne sont pas explorées en clinique quotidienne. Ces anomalies sensorielles ont des retentissements oculomoteurs (fixation, induction optomotrice) et sur la coordination. La vision monoculaire n’autorise pas de vision stéréoscopique (binoculaire par essence) mais cela n’est pas synonyme d’absence de vision du relief car de nombreux éléments monoculaires peuvent suggérer le relief. Il ne faut pas négliger les possibilités de faux positifs des tests de vision stéréoscopique, conçus pour être vus dans des conditions binoculaires, afin de ne pas conclure à la présence d’une stéréopsie chez un patient qui ne remplit pas les conditions de la présence de celle-ci (particulièrement en cas de déviation strabique).

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