La frontière entre la sphère de l’intimité et la sphère de la politique est constitutive de la modernité depuis les premières réflexions sur l’État moderne et le for intérieur (Hobbes). Depuis les années 1960, cette frontière a été brouillée sous l’effet des nouvelles politiques du corps : politique du genre, politique de la famille, politiques de la vie telles qu’elles se sont mises en place à la fois dans les techniques de procréation médicale assistée et les techniques biomédicales. Dans chacun de ces domaines, l’État est conduit à intervenir dans ce qui relevait autrefois de la sphère intime. À la rencontre entre politique et intimité, le soin, et particulièrement le soin palliatif, est devenu un observatoire privilégié de cette mutation, discrète mais profonde, de certains fondements anthropologiques des sociétés contemporaines.

The frontier between intimacy and the political sphere has been one of the supports of Modernity since the first philosophical reflexions about Modern State and the “for intérieur” (Hobbes). Since the 1960s, this frontier has been blurred in relation with the new “body policies”: gender policies, family policies, life policies, ranging from biogenetics to the staying with the dying and the question of euthanasia, without omitting assisted procreation and research on stem-cells. In each of these fields, the consequence of the new body policies is mainly the intervention of State in what was beforehand considered as an intimate sphere. On the frontier between intimacy and the political sphere, care, particularly the palliative care, has become a good observatory of that discreet, but essential, transformation of some of the anthropological foundations of contemporaneous societies.