Consommation de compléments alimentaires en France : inoffensive ? À partir des cas connus du centre antipoison Est de 2019 à 2023 - 11/09/24
Riassunto |
Objectif |
La consommation de compléments alimentaires (CA) en France est fréquente et en constante augmentation. Ainsi, l’étude INCA 3 montre une augmentation de 50 % de leur consommation entre 2007 et 2015, aussi bien chez les enfants de 3 à 17ans que chez les adultes (respectivement 19 et 29 % de consommateurs en 2015). Les CA sont achetés en pharmacie (78 % pour les enfants et 45 % pour les adultes) mais l’achat sur Internet se développe [1 ]. Malgré leur « bonne image », ils peuvent causer des effets indésirables, y compris graves. L’objectif est d’évaluer rétrospectivement les cas d’intoxications de gravité moyenne ou forte, à partir des données du centre antipoison Est sur les 5 dernières années.
Méthode |
Extraction du système d’information des Centres antipoison des patients ayant fait l’objet d’un appel toutes circonstances confondues et quel que soit l’âge pour une exposition aux CA, d’imputabilité non nulle, de gravité moyenne ou forte (PSS 2 ou 3), gérés en activité réponse toxicologique urgente par le CAP Est entre le 01/01/2019 et le 31/12/2023.
Résultats |
Au total, 50 cas d’effets moyens ou graves impliquant des CA ont été recensés, dont 5 cas PSS 3 (2 comas Glasgow 3, 1 état de mal épileptique, 1 AVC et 1 syndrome de Lyell). Le sexe ratio H/F est à 1 et l’âge moyen est de 35,4ans (± 24,0) avec une médiane à 28,8ans [0,2–94,8]. Les circonstances sont essentiellement des effets indésirables à posologie usuelle (42 %), des mésusages (18 %) et des gestes suicidaires (28 %). Dans 3 cas, lors d’accident domestique, des enfants âgés de 1 à 3ans ont consommé une boite de CA en vrac ressemblant à des friandises. Deux erreurs thérapeutiques sont rapportées (confusion de poudre en sachet à domicile, inversion de patient en EHPAD). Les allégations des CA en cause sont : immunité-vitalité (38 %), musculation (16 %), perte de poids (14 %) et sommeil-stress (10 %). Les effets indésirables décrits sont digestifs (34 %), neuromusculaires (28 %), cardiologiques (18 %) et dermato-allergologiques (12 %). Les 3 seuls cas avec des signes respiratoires sont des fausses routes, avec un comprimé (F, 37ans), une capsule molle (H, 86ans) et une solution en dosette (M, 6jours). Un cas d’adultération par sibutramine est prouvé dans un CA pour maigrir.
Discussion |
Hormis les données INCA 3 datant de 2015 et celles issues du syndicat de vente Synadiet, les données épidémiologiques récentes sur la consommation des CA en France sont rares. Les cas de notre série surviennent à part égale dans les 2 sexes, alors que la consommation est surtout féminine (59 %) [1 ]. Dans notre série, les CA « musculation », avec 7/8 consommateurs masculins, expliquent le sexe ratio à 1. Les allégations retrouvées sont comparables à celles des CA les plus vendus selon Synadiet (immunité et vitalité, sommeil et stress et digestion : 50 % des ventes et 54 % des cas de notre série), mais on retrouve notamment des CA pour la prise de muscles (16 %) et la perte de poids (14 %). Pour ces derniers, l’obtention a généralement lieu en direct (salle de sport, cabinet de naturopathie, salon bien-être…) ou sur des sites internet. Dans notre série, 52 % des produits correspondent à ce type de circuit, dont 100 % des produits pour le sport et 86 % des CA pour maigrir.
Conclusion |
Les cas d’effets de gravité moyenne ou forte en lien avec des CA concernent tous les sexes, les âges et les circonstances, y compris pour des allégations en apparence « inoffensives » comme la fatigue ou les maux de l’hiver. Il convient donc de sensibiliser les professionnels de santé impliqués dans leur conseil et, en cas de symptômes, d’encourager à demander un avis au centre antipoison et/ou signaler au dispositif ANSES de nutrivigilance.
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Vol 36 - N° 3S
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