Predictive prospective studies of schizophrenia date back to the late 1950s. At the turn of the Millennium, an Australian research group initiated programs of early detection of schizophrenia and early therapeutic intervention. The theoretical foundations of early schizophrenia detection usually remain unaddressed. In this paper, we focus on the issue of prediction of future schizophrenia in the general population on the basis of a symptomatic picture. Several notions used in this research program such as disease, symptom, and clinical staging derive from a medical model, which in our view is not entirely adequate for grasping the nature of schizophrenia. Schizophrenia is a spectrum of disorders with a shared core Gestalt comprising dis-order of selfhood and intersubjectivity. This core Gestalt has manifold manifestations, often predominantly in the existential or experiential domain. It is not feasible to apply medical concepts to this symptomatically poorly demarcated spectrum for which we do not know robust biological validators. Moreover, there is increasing evidence that the current DSM and ICD criteria of schizophrenia distort the original concept of schizophrenia and are formulated on a very high severity level. This often results in incorrect diagnoses of young help-seeking patients. In sum, it seems more appropriate to detect psychosis among already help-seeking patients than to implement detection programs in the general population. We discuss a reorientation of psychiatry towards more refined psychopathological knowledge and assessment that are needed in order to optimize the treatment of young help-seeking patients.

Les premières études prospectives portant sur la schizophrénie et sur sa possible prédiction remontent à la fin des années 1950. À la fin du _xx^e siècle, des programmes de détection et d’intervention thérapeutique précoces de la schizophrénie ont vu le jour, notamment à l’initiative d’une équipe de recherche australienne. Les fondements théoriques qui sous-tendent cette notion de détection précoce de la schizophrénie restent cependant rarement questionnés. Dans cet article, nous revenons sur la question d’une prédiction possible de la schizophrénie en population générale, à partir d’éléments sémiologiques, de symptômes.

Plusieurs notions utilisées dans cette perspective de recherche (telles que les termes « maladie », « symptômes » ou « stades cliniques ») dérivent d’un modèle médical, qui, selon nous, ne permet pas de rendre pleinement compte de la nature de la schizophrénie.

La schizophrénie consiste en un ensemble (ou spectre) de troubles, dont le noyau commun, la Gestalt, implique la perturbation du sens de soi et de l’intersubjectivité. Ce noyau commun comporte de multiples manifestations, particulièrement dans le domaine existentiel, ou expérientiel. Il est particulièrement réducteur d’appliquer des concepts strictement médicaux à un spectre dont les limites symptomatiques se démarquent difficilement, sans validateur biologique robuste. Enfin, il existe des travaux de plus en nombreux montrant que les critères du Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (DSM) et de la classification internationale des maladies (CIM) actuels risquent de distordre le concept original de schizophrénie, avec une sévérité clinique particulièrement marquée. Ce dernier point favorise souvent des errances diagnostiques chez les jeunes personnes en recherche de soins.

En somme, il semble plus approprié de chercher à déceler la psychose chez les patients déjà engagés dans une recherche de soins, plutôt que de réaliser des programmes de détection au sens large, en population générale. Nous discuterons enfin de la réorientation nécessaire de la psychiatrie vers un savoir et une évaluation plus exigeants en termes de psychopathologiques, pour mieux prendre en charge ces jeunes patients en recherche de soins.