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Étude comparative de dix sujets SDF fréquentant un centre d’hébergement d’urgence et de dix sujets SDF vivant uniquement dans la rue : acceptation et refus de l’hébergement d’urgence - 19/09/13

Doi : 10.1016/j.amp.2012.10.015 
Gaétan Langlard a, , b , Evelyne Bouteyre b
a EA 4700, laboratoire PsyNca, université de Rouen, 76821 Mont-Saint-Aignan, France 
b EA 3278, laboratoire LPCLS, université de Aix-Marseille, 13331 Aix-en-Provence, France 

Auteur correspondant. EA 4700, UFR des sciences de l’homme et de la société, laboratoire PsyNca, université de Rouen, 1, rue Lavoisier, 76821 Mont-Saint-Aignan, France.

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Résumé

Objectifs

Ces dernières décennies ont vu naître une augmentation du nombre de personnes sans domicile fixe (SDF) dans nos sociétés occidentales. Les autorités publiques ont développé un massif dispositif d’assistance visant à traiter ce « problème » SDF par l’hébergement d’urgence. Ce type d’hébergement ne pose généralement aucune condition d’admission et répond à une nécessité de mise à l’abri immédiate de la personne. Pourtant, de nombreuses personnes SDF refusent l’hébergement d’urgence, même en hiver. Elles préfèrent dormir dehors dans des conditions de vie extrêmes. L’objectif de cet article est d’aider à comprendre le refus et l’acceptation de l’hébergement d’urgence de la population SDF.

Patients/matériel et méthode

Dans cette étude, un groupe de dix sujets SDF usagers d’un centre d’hébergement d’urgence (CHU) est comparé à un groupe de dix sujets SDF refusant l’hébergement d’urgence et vivant uniquement dans la rue. Auprès de chaque sujet, un entretien semi-directif est mené. L’échelle HAD (Zigmond AS et Snaith RP, 1983) et l’échelle d’estime de soi (Rosenberg M, 1969) sont administrées. En complétant l’analyse des données recueillies lors des entretiens de recherche avec l’analyse statistique des résultats des passations d’échelles, nous mettrons en évidence les points communs et les différences expliquant le refus ou l’acceptation de l’hébergement d’urgence.

Résultats

Les points communs entre ces deux groupes de sujets sont les suivants : tous ont connu un passé douloureux, voire traumatique. Ces sujets ont vécu de nombreuses ruptures, abandons, carences les ayant fortement perturbés et affectés. L’accumulation d’événements de vie chroniques et souvent traumatiques a fait que le dernier événement en date est identifié par ces sujets comme la cause de leur situation de SDF. Leur survie au jour le jour implique un passage à l’acte constant dans l’espace de la rue, traduisant une cristallisation psychique, une élaboration psychique impossible. Ces deux groupes de sujets se distinguent principalement dans leurs façons d’appréhender leur situation SDF. Ainsi, l’acceptation/refus de l’hébergement d’urgence renvoie à une acceptation/refus de l’identité de SDF, une adaptation/inadaptation à la condition SDF, une acceptation/refus d’assistance et une acceptation/refus de l’espace collectif. Au niveau quantitatif, on note un lien entre l’anxiété/dépression et le refus d’hébergement d’urgence. Les sujets refusant l’hébergement d’urgence présentent un niveau de dépression significativement plus élevé (10,3 contre 7,1) et un niveau d’anxiété significativement plus faible (11 contre 14,1) que les sujets usagers des CHU.

Conclusions

Cette étude permet de considérer le refus d’hébergement des personnes SDF comme une volonté de ne pas subir passivement leur situation d’exclusion sociale. Elles maintiennent un mode de vie volontairement difficile entraînant une souffrance psychique plus importante que celle des personnes hébergées ; cela pour ne pas s’installer dans leur situation. À l’inverse, les usagers réguliers des CHU les investissent et y trouvent un cadre et de nouveaux repères. Cet investissement entraîne un soulagement et une souffrance psychique moindre qui favorisent une sur-adaptation à leur condition de vie.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Abstract

Objectives

The last decades have seen an increasing number of homeless people (SDF) in Western societies. Public authorities have developed a solid assist device to treat this “homeless problem” by creating emergency shelter. Generally, this type of accommodation does not set any condition of admission and answers an immediate need of safekeeping of the person. Yet many homeless people refuse emergency shelter, even in winter. They prefer to sleep outside in extreme conditions. The purpose of this article is to help understanding the refusal and the acceptance of emergency accommodation for the homeless population.

Patients/materials and methods

In this study, a group of ten homeless subjects using emergency shelter (CHU) is compared to a group of ten homeless subjects who are refusing the emergency shelter and living only on the streets. To each subject, a semi-structured interview, an evaluation of the HAD scale (Zigmond AS and Snaith RP, 1983) and one of the self-esteem scale are conducted (Rosenberg, 1969). The analysis of data, collected during research interviews, will be completed with the statistical analysis of the results of the scale's test. Thereby we will highlight the similarities and the differences explaining the denial or the approval of emergency shelter.

Results

The common point between these two groups of subjects is the following: each of them has a traumatic or painful past. These subjects experienced many failures, dropouts, deficiencies which have seriously disrupted and affected them. The accumulation of chronic and traumatic life events made that the most recent event is identified by these subjects as the cause of their homeless situation. Survive from day to day involves a constant acting out in the street space, reflecting an impossible psychic crystallization or development. These two groups of subjects differ mainly in their ways of understanding their homeless situation. Thus, the acceptance/refusal of emergency shelter refers to an acceptance/refusal of the homeless identity, a fitting/misfitting to the homeless conditions, an acceptance/refusal of assistance, and acceptance/rejection of the collective space. In quantitative terms, there is a link between anxiety/depression and the denial of emergency shelter. Subjects refusing emergency shelter have a depression level significantly higher (10.3 against 7.1) and anxiety level significantly lower (11 against 14.1) than subjects users of emergency shelter.

Conclusions

This study allows us to consider the denial of accommodation of the homeless as a will not to passively suffer from their situation of social exclusion. Those homeless subjects voluntarily maintain a difficult lifestyle causing a greater psychological suffering than the ones using emergency shelter, and this not to settle in their situation. At the opposite, regular users find in emergency shelter a social frame and some new benchmarks. This leads to a relief and to a lower mental suffering that promote an over-adaptation of their living conditions.

Le texte complet de cet article est disponible en PDF.

Mots clés : Exclusion, Personnes sans domicile fixe, Précarité, Refus d’hébergement d’urgence, Souffrance psychosociale

Keywords : Emergency shelter denial, Exclusion, Homeless, Insecurity, Psychosocial distress


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Vol 171 - N° 8

P. 531-537 - septembre 2013 Retour au numéro
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