Souffrance psychique des cadres infirmiers : étude portant sur 97 cadres d'un centre hospitalier universitaire français - 15/02/08
S. Fanello [1],
C. Morlier-Tournelle [1],
B. Ripault [2],
E. Parot [1],
B.A. Kandouci [2],
G. David [3],
D. Penneau-Fontbonne [2]
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But de l'étude |
Le travail est souvent un élément de santé ; cependant, certaines contraintes psychologiques et physiques au travail font qu'il peut parfois être une source de déstabilisation de l'individu. La souffrance psychique au travail est donc une réalité, et ce quelle que soit la profession. Nous avons effectué une enquête sur la santé mentale des cadres infirmiers d'un CHU français, afin de caractériser le lien entre la souffrance psychique et les conditions actuelles de travail.
Méthode |
L'étude a été menée auprès de 97 cadres infirmiers à l'aide d'un auto-questionnaire qui comprenait les caractéristiques sociales et professionnelles, le vécu au travail et un questionnaire standardisé de santé mentale, le GHQ 12. Des questions ouvertes ont permis de faire état de propositions concrètes pour l'amélioration de certaines situations de travail.
Résultats |
Le taux de réponses était de 89 % ; un tiers des cadres infirmiers interrogés présentait une souffrance psychique (score GHQ 12 supérieur à 12). Aucune des variables sociales ou de celles concernant les tâches professionnelles en elles-mêmes n'était liée à la souffrance psychique des cadres, à l'exception de la gestion du matériel (p = 0,0036). Les possibilités d'épanouissement personnel, de liberté d'initiative et les relations avec les autres ne constituaient pas des facteurs liés à la souffrance psychique. Cependant, les éléments liés au bien-être au travail et à la reconnaissance du travail apparaissaient très déterminants dans l'existence d'une souffrance psychique. C'était l'impossibilité d'effectuer un travail de qualité qui les faisait le plus souffrir mentalement, sous-tendue par un manque de moyens en personnel.
Lors des questions ouvertes, les cadres parlaient de réactualiser la fonction de cadre infirmier (création d'un poste de cadre adjoint) et du décalage existant entre l'idéal professionnel et la réalité de terrain. Ils exprimaient un vif regret d'exercer leurs fonctions dans de telles conditions (manque de personnel et de moyens, lourdeur des tâches administratives et légales) et remettaient en cause la fonction d'encadrement elle-même (manque de collaboration avec la hiérarchie et avec le personnel encadré). Ils souhaitaient également avoir accès à des formations adaptées à leur fonction particulière d'encadrement et à des lieux de dialogue entre professionnels.
Discussion |
La reconnaissance est au coeur de la souffrance psychique au travail, particulièrement dans les relations avec les médecins. Il est nécessaire de repenser certains aspects de la fonction de cadre en développant des collaborations nouvelles et des stratégies plus centrées sur la personne soignée. Il faudra redonner un sens au travail pour permettre de développer des compétences trop souvent occultées au profit de la réalisation de tâches hors fonction. Si une démarche individuelle est sans doute amorcée pour bon nombre de cadres infirmiers, il reste à développer des stratégies collectives identitaires et à renforcer non seulement la communication avec la hiérarchie, mais aussi la collaboration sur le terrain avec les soignants.
Conclusion |
C'est au prix de ces changements et avec l'aide d'une structure d'écoute (soutien psychologique) que l'on pourra réduire la souffrance des cadres et améliorer la qualité des soins.
Psychological distress in charge nurses: a study of 97 charge nurses in a university hospital center. |
Objectives |
Work is often one element of health; some psychological and physical constraints on the job can unsettle individuals. Psychological distress at work is thus a reality, regardless of the occupation. We conducted a mental health survey among the charge nurses of a university hospital center in order to assess the association between psychological distress and current working conditions.
Method |
97 charge nurses were asked to participate in this study by completing a self-administered questionnaire that included social and occupational characteristics, workplace experience and a standardized mental health questionnaire — GHQ 12. Open questions enabled us to obtain concrete suggestions for improving some work situations.
Results |
The response rate was 89%; one third of the charge nurses questioned were considered to be in psychological distress (GHQ 12 score greater than 12). None of the social or occupational variables was associated with psychological distress in this population, except responsibility for managing supplies and other materials (p = 0.0036). The possibilities for personal fulfilment, use of personal initiative, and relationships with others were not related to psychological distress. On the other hand, variables associated with wellbeing and recognition at work were important in determining the existence of psychological distress. Their inability to perform high-quality work, because of inadequate staffing levels, caused them the greatest mental distress. These supervisors spoke of disorganization at work and especially of the discrepancy between their professional ideals and the reality on the ground. They expressed keen regrets about their work in such conditions and called into question the role of supervisors.
Discussion |
Recognition is at the heart of psychological distress at work; this finding requires us to rethink some aspects of supervisors' role and develop new collaborations and strategies focused more directly on the patient. Work must acquire a new meaning and purpose to enable the development of skills too often overshadowed by job duties involving tasks outside the real nursing role. While many charge nurses have undoubtedly begun to take individual steps in that direction, collective identity-based strategies must still be developed, so that the communication of these nurses with their supervisors and chain of command is reinforced, together with their collaboration in the field with the care-givers they supervise.
Conclusion |
Reduction of the distress of charge nurses and improvement of patient care will require the changes mentioned above as well as the provision of psychological support to them.
Mots clés :
Souffrance psychique
,
Hôpital
,
Cadres infirmiers
Plan
© 2003 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Vol 64 - N° 6
P. 375-382 - novembre 2003 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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