Choléra à Mayotte en 2024 : diagnostic et prise en charge à l'hôpital - 12/02/25
Résumé |
Le choléra est une toxi-infection digestive bactérienne (V cholerae) responsable d'une diarrhée eau de riz parfois fulminante (cholera gravis). Depuis plusieurs mois, la 7e pandémie de choléra s'intensifie notamment en Afrique continentale [1], pour diffuser plus récemment à l'Union des Comores puis à Mayotte en 2024. Le premier cas de choléra y a été confirmé le 18 mars. Le dernier cas du 12 juillet 2024 a fait porter le nombre total de cas confirmés à 215. Les bidonvilles (« bangas ») du Nord de l’île (Koungou notamment) ont été les premiers touchés puis ceux du Sud-Mamoudzou (Passamainty, M'Tsapere, Doujani, etc.). 25 patients (11,6 %) ont été pris en charge par les équipes de la réanimation du Centre Hospitalier de Mayotte. 16 patients ont été pris en charge pour un choc hypovolémique.
Ces patients étaient âgés de 17 ans (médiane) avec un sex ratio équilibré. Le tableau clinique était caricatural et associait systématiquement une altération de la vigilance (de la somnolence au coma) à des yeux creusés. L'hypotension artérielle ne concernait que la moitié des patients. Le débit de selles était élevé avec une médiane d'une selle toutes les deux heures. Le tableau biologique était dominé par une acidose métabolique profonde (pH veineux systématiquement inférieur à 7,20) et une insuffisance rénale aiguë, d'abord fonctionnelle puis organique en cas de retard de prise en charge, avec une médiane de créatininémie à 220 µmol/L pour les adultes,140 µmol/L pour les enfants. Le PCR V cholerae était positive dans le prélèvement de selles (médiane de 21 Ct) et le panel multiplex identifiait systématiquement (sauf pour un patient) un autre germe (Shigella, Campylobacter, E. Coli, etc.) sans que nous ne puissions en définir le rôle pathogène ou l'impact pronostique (publication des données en cours).
Au Centre Hospitalier de Mayotte, les patients étaient « triés » dans une tente jouxtant l'unité choléra (unité de 14 lits avec une montée en charge possible jusqu’à 30 lits). Les critères de sévérité de notre protocole étaient : Glasgow < 14, yeux creusés, pH veineux < 7,20. Un seul de ces critères justifiait un remplissage vasculaire agressif utilisant la règle des 100 mL/kg de Ringer Lactate sur 4 à 6 heures [2]. La médiane de réhydratation des 48 premières heures était de 280 mL/kg. Le Ringer Lactate était privilégié car sa composition est proche (sauf pour le potassium) de la diarrhée des patients atteints de choléra [3] et le lactate comme anion est rapidement transformé en bicarbonates dans le cycle de Cori permettant probablement une correction plus rapide de l'acidose métabolique [4]. La compensation liquidienne perte/perte et la supplémentation potassique sont les autres enjeux de la prise en charge. Les protocoles doivent être simples et enseignés aux équipes médicales et paramédicales prenant en charge les patients.
À Mayotte, aucun patient n'est décédé à l'hôpital. Cinq patients sont décédés du choléra (décès confirmés) en extrahospitalier. La prévention, l'information et la rapidité d'accès aux soins des populations les plus précaires devraient ainsi rester des objectifs prioritaires.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Mots-clés : choléra, réanimation, Mayotte
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Vol 4 - N° 1S
P. S15-S16 - février 2025 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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