Souvent réduite au seul concept de mastication, l'ingestion correspond à la première étape de la digestion. Elle débute lorsque l'aliment est introduit dans la cavité buccale et se termine lorsque le bol alimentaire franchit l'isthme du gosier et est projeté dans l'oropharynx. Son rôle est de transformer l'aliment en bol alimentaire, grâce à des actions orales spécifiques comme la morsure, la mastication, la succion, la manipulation des aliments avec la langue et les joues, et la déglutition. La « mastication » ne fait donc référence qu'à l'une des étapes de l'ingestion. Si cette approche gnathologique a permis de répondre aux problématiques cliniques posées par le traitement des édentements, l'évolution des concepts sur la santé et les maladies implique désormais, pour décrire les fonctions orales, de se référer à l'approche systémique utilisée par les classifications internationales. Le diagnostic et le traitement des troubles fonctionnels orofaciaux, en particulier concernant l'ingestion, font partie des missions essentielles du chirurgien-dentiste, qui se doit de maîtriser les concepts, la terminologie et les critères d'évaluation des états de santé concernant son exercice professionnel. Cet article aborde, dans une première partie, la description des mécanismes physiologiques de l'ingestion (structures anatomiques en jeu, contrôles neuromoteurs, cinématique masticatoire) et des mécanismes adaptatifs à différentes conditions (modifications environnementales, nature des aliments, mastication unilatérale, vieillissement). La deuxième partie est consacrée à l'étiopathogénie des troubles de l'ingestion, qui implique différents facteurs de risque (état buccodentaire, troubles neuromoteurs, psychosensoriels, salivaires), à leurs conséquences nutritionnelles et sociales et aux méthodes utilisées pour évaluer l'efficacité masticatoire (paramètres cinématiques, granulométriques, dentaires et occlusaux, salivaires et psychométriques grâce à différents types de questionnaires).