Les eaux usées représentent un compartiment sentinelle permettant d'identifier la (co)-circulation de divers pathogènes au sein de la population mais aussi de détecter une émergence en cours et de suivre l’évolution de nouveaux variants ou de nouvelles espèces dans l'espace et dans le temps. Cependant, peu d’études ont testé le potentiel que représente l'analyse des eaux usées en zone tropicale, notamment en Guyane, et peu d’études se sont intéressé à des pathogènes cryptiques et/ou négligés.

Entre octobre 2020 et juillet 2021, nous avons suivi la dynamique du SARS-CoV-2 et de ses variants dans les eaux usées en Guyane. Pour cela, chaque mois nous avons récolté les eaux usées au niveau de 36 points de refoulement répartis spatialement sur le territoire guyanais. Nous avons utilisé soit des approches de qPCR ou de métabarcoding pour identifier la présence et l'abondance de pathogènes zoonotiques. Outre la détection du SARS-CoV-2, nous avons également analysé la présence du pathogène responsable de la fièvre Q, la bactérie Coxiella burnetii, et les bactéries responsables de la Leptospirose (Leptospira sp.).

Nos Résultats indiquent qu'il est possible, en zone tropicale et notamment en Guyane, de suivre la dynamique d'une épidémie telle que le Covid-19 et l’évolution des variants du SARS-CoV-2 dans l'espace et dans le temps au travers l'analyse des eaux usées. En ce qui concerne la fièvre Q, nos Résultats indiquent une circulation cryptique, une dispersion limitée et des émergences ponctuelles. En revanche, pour la leptospirose, nous observons une large présence de la bactérie sur l'ensemble du territoire, sans effet saisonnier marqué et sans corrélation forte avec la densité de population. De plus, l'utilisation du métabarcoding nous a permis d'identifier la co-circulation de 16 espèces ou groupes d'espèces de leptospirose incluant notamment l'espèce pathogène pour l'Homme et responsable de cas de Leptospirose chez l'Homme en Guyane Leptospira interrogans.

Ces Résultats soulignent le potentiel que représente le suivi épidémiologique dans les eaux usées, notamment en zone tropicale, permettant non seulement de suivre la présence de plusieurs pathogènes à partir d‘un même échantillon d'eau mais aussi de détecter la co-circulation d'espèces ou de variants de ces pathogènes et l’évolution de leur présence et/ou abondance ou cours du temps. Le suivi de pathogènes dans les eaux usées représente donc un outil à fort potentiel, non invasif, rapide et facilement utilisable par les agences de santé et les agences de l'eau, par exemple.