Phénotype neuroconnectif et syndromes d’hypermobilité articulaire : une pathologie multisystémique pour l’interniste - 28/11/24
Résumé |
Introduction |
La forte prévalence des syndromes d’hypermobilité articulaire (SHA) chez les patients souffrant de troubles du neurodéveloppement (TND) a conduit récemment à proposer la création d’un nouveau phénotype dit neuroconnectif, combinant et reliant les aspects psychopathologiques et les troubles somatiques (digestifs, articulaires et myofasciaux) chez les patients hypermobiles [1 ]. Le tissu conjonctif, “grand unificateur de l’organisme” comme le théorisait Kapandji serait ainsi le fil conducteur reliant toutes les structures impliquées notamment dans l’atteinte multisystémique des TSA : système immunitaire, système sensori-moteur et axe intestin-cerveau [2 ]. La question d’une différence éventuelle en terme d’atteinte et de sévérité entre les patients hypermobiles souffrant de TND et les hypermobiles sans TND mais présentant les critères cliniques des SHA les plus fréquents (syndrome d’Ehlers Danlos hypermobiles et troubles du spectre de l’hypermobilité ou hEDS/HSD) est posée.
Patients et méthodes |
Dans notre cohorte, étudiée sur la période 2022-2024, les paramètres suivants étaient recueillis au moment du diagnostic : poids, IMC, niveau d’anxiété (échelle HAD), kinésiophobie (TAMPA), dysautonomie (SCOPA-AUT), qualité de vie gastro-intestinale (GIQLI), présence d’un syndrome d’hyperventilation inadaptée (Nijmegen), fatigue (échelle de Pichot), douleur (EVA), qualité du sommeil (PSQI), niveau d’activité physique (IPAQ), qualité de vie (EVA). Un dosage de tryptasémie était systématiquement réalisé au diagnostic.
Résultats |
54 patients hEDS/HSD et 38 patients avec un phénotype neuroconnectif étaient analysés. Bien que le score de Nijmegen soit plus élevé dans le groupe neuroconnectif (p=0,035), tous les patients souffraient d’hyperventilation. Les deux groupes différaient en ce que leur qualité de vie gastro-intestinale était plus altérée (score GIQLI 59 vs 65, p=0,047) et leur score HAD sous score A(anxiété) était plus bas (13 vs 10, p=0,042), indiquant un niveau d’anxiété plus élevé chez les patients neuroconnectifs. Les deux groupes ne différaient pour aucun des autres paramètres étudiés. Sur les 38 patients du groupe neuroconnectif, le diagnostic de neuroatypie (TDAH, TSA notamment) a pu être porté et confirmé au moment de la prise en charge du syndrome douloureux à l’âge adulte. Deux patients du groupe hEDS/HSD présentaient une tryptasémie de façon modérée élevée (mais<20 microg/L) au moment du diagnostic. Ils étaient porteurs d’une mutation HAT sans mutation KIT D816V identifiée.
Discussion |
Conçu pour mieux comprendre la symptomatologie multisystémique des patients et les mécanismes physiopathologiques impliqués, le phénotype neuroconnectif permet une approche globale des patients. Il se caractérise par un niveau d’anxiété plus élevé et une qualité de vie gastro-intestinale plus faible. Ces caractéristiques sont cependant communes chez tous les patients souffrant des conséquences de SHA. Le niveau de dysautonomie reste élevé chez tous les patients et ne semble pas être un facteur de différenciation. Nombre de signes de dérégulation du système nerveux autonome (dont l’hyperventilation inadaptée) sont communs avec ceux des syndromes d’activation mastocytaire pour la majorité d’entre eux et peuvent être le reflet de l’activation du système biologique de sécurité/insécurité mis en jeu selon la théorie polyvagale [3 ].
Conclusion |
Le phénotype neuroconnectif mérite d’être connu des internistes et peut permettre de dépister, y compris chez des adultes de tout âge des troubles du neurodéveloppement auparavant non diagnostiqués. Chez un patient douloureux chronique il semble ainsi important de : 1) vérifier la présence ou non d’une hypermobilité articulaire généralisée ; 2) s’assurer de l’absence de neuroatypie (ou « trouble de la constellation des dys ») afin de ne pas porter abusivement le diagnostic de fibromyalgie et de permettre une prise en charge adaptée et spécifique.
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Vol 45 - N° S2
P. A407-A408 - décembre 2024 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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