Prévalence et caractéristiques de la maladie de Kienböck chez les patients atteints de sclérodermie systémique - 26/11/24
Résumé |
Introduction |
La maladie de Kienböck (MK) est une nécrose avasculaire du lunatum dont la physiopathologie reste méconnue. La sclérodermie systémique (ScS) est caractérisée par une triade associant fibrose des tissus conjonctifs, altération de la microvascularisation et dysfonctionnement du système immunitaire. Suite aux diagnostics successifs de 3 cas de MK chez des patients suivis dans notre service pour une ScS, nous avons voulu évaluer le lien entre ces deux pathologies.
Objectif |
Étudier la prévalence de la maladie de Kienböck chez les patients sclérodermiques et tenter d’en déterminer les facteurs associés dans cette population.
Patients et méthodes |
Étude transversale à visée analytique. Dans un premier temps, la prévalence de la MK a été évaluée au sein d’une cohorte régionale de patients sclérodermiques. Les critères d’inclusion étaient les suivants : âge>18 ans, diagnostic de sclérodermie systémique selon les critères ACR-EULAR 2013, radiographie des poignets disponibles. Dans un second temps, afin d’analyser les facteurs associés à la MK chez les patients sclérodermiques, un appel à observations national a été réalisé, permettant d’ajouter des cas d’association de ces deux pathologies à ceux de la cohorte régionale.
Résultats |
Au sein de la cohorte régionale, 168 patients ont été inclus parmi lesquels 13 cas de MK ont été identifiés, soit une prévalence de 7,7 %. Pour l’analyse des facteurs associés, nous avons ajouté 10 cas d’association MK/ScS recueillis via l’appel à observation national. Dans cette nouvelle population de 178 patients, l’analyse univariée (Figure 1) a révélé une association significative de la MK avec la positivité des anticorps anti-Scl70 (p<0,0001), la présence d’une pneumopathie interstitielle (p<0,0001), l’exposition aux vibrations (p=0,03), l’exposition à la silice/solvants organiques (p=0,016) et la présence d’ulcères digitaux (p=0,001). Après analyse multivariée (Figure 2), seules l’exposition aux vibrations (OR 9,95 [IC 95 % 1,22–81,07]) et la dysimmunité anti-Scl70 (OR 20,29 [IC 95 % 1,93–213,58]) ont été retenues comme facteurs associés significatifs et indépendants de MK dans la ScS.
Discussion |
Cette étude montre une prévalence de la MK chez les patients sclérodermiques très largement supérieure à celle rapportée dans la population générale (7,7 % vs 7/100 000), suggérant un lien fort entre ces deux pathologies. Concernant les facteurs associés, nos résultats semblent confirmer que l’exposition aux vibrations est un facteur associé à la MK, comme rapporté dans la population générale. De manière plus spécifique à la ScS, la dysimmunité anti-Scl70 semble être un facteur associé à la MK. Une hypothèse pouvant expliquer la forte prévalence de la MK au sein de cette population serait la participation de la vasculopathie sclérodermique. Cette étude constitue à notre connaissance la plus grande série de cas rapportés. Ses limites sont le caractère rétrospectif et l’absence de certitude quant à la date de l’apparition de la MK, nous amenant à évoquer des facteurs associés et non des facteurs de risque.
Conclusion |
La prévalence probablement sous-estimée de la MK chez les patients sclérodermiques souligne la nécessité de ne pas méconnaître cette maladie comme cause potentielle de douleur ou de gêne fonctionnelle du poignet dans cette population. Il convient d’apporter une attention particulière chez les patients dont le profil vasculaire est au premier plan et ceux soumis à des contraintes mécaniques.
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Vol 91 - N° S1
P. A242 - décembre 2024 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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