Les pratiques de soins non conventionnelles sont utilisées par une large proportion de la population générale et des patients souffrant de maladie chronique. Cet usage suscite régulièrement des inquiétudes des pouvoirs publics en France, en raison, notamment, de risques éventuels de dérives. Il attire les critiques de collectifs engagés dans la lutte contre ce qu'ils qualifient de « fausses médecines », par opposition à la « vraie » médecine, dite « conventionnelle ». Cet article propose une analyse critique, épistémologique et scientifique de ces concepts de « médecine conventionnelle » et de « pratiques de soins non conventionnelles » et de leurs critères de démarcation. Il met en lumière que les secondes sont définies en opposition à la médecine conventionnelle, alors que celle-ci ne dispose d'aucune définition précise. Il questionne le qualificatif « non conventionnel » face à l'intégration croissante de ces pratiques dans la médecine conventionnelle et l'enseignement facultaire en santé. Si la démarche scientifique est indispensable pour évaluer les pratiques de soins en médecine et leur efficacité, elle est insuffisante pour distinguer médecine conventionnelle et pratiques non conventionnelles. Des éléments de contexte culturels, politiques, sociétaux et corporatistes qui maintiennent de façon discutable cette opposition entre médecine conventionnelle et pratiques non conventionnelles sont explicités. Cette déconstruction ne vise pas à nourrir une position relativiste mettant sur le même plan médecine conventionnelle et pratiques de soins non conventionnelles. Elle tente d'éclairer le public et les professionnels sur les enjeux rarement abordés d'une simplification courante du sujet. Des propositions sont formulées pour sortir de cette impasse, notamment la structuration d'une médecine intégrative qui intègre de façon cohérente et raisonnée certaines pratiques non conventionnelles aux traitements conventionnels dans des parcours de soins bien définis. Cette médecine intégrative vise un soin global pour les patients, en garantissant un accès sécurisé à certaines pratiques et une réduction des usages à risque.