Caractéristiques neurologiques de la sclérose en plaque associée à une uvéite : étude cas témoins monocentrique - 08/06/24
Résumé |
Introduction |
La sclérose en plaques (SEP) est une maladie inflammatoire et démyélinisante du système nerveux central qui touche préférentiellement les jeunes femmes [1 ]. Les atteintes ophtalmologiques sont une manifestation fréquente et souvent initiale. L’uvéite est rare au cours de la SEP, rapportée chez 0,53 à 1,34 % des patients [1 ]. Elle peut précéder la SEP, être de diagnostic concomitant ou survenir au cours de l’évolution et son lien avec le pronostic neurologique est controversé. Raskin et al. et Shugaiv et al. ont montré un handicap fonctionnel dû à la SEP, évalué par l’Expanded Disability Status Scale (EDSS), moindre pour les SEP avec uvéite. Cependant, Le Scanff et al. n’ont pas montré de différence significative [2 ] tandis que Martin et al., plus récemment, ont rapporté un pronostic plus péjoratif [3 ]. L’objectif de ce travail est d’évaluer les caractéristiques démographiques, cliniques et le pronostic neurologique des SEP avec et sans uvéite.
Patients et méthodes |
Nous avons réalisé une étude rétrospective cas-témoins monocentrique au sein des Hospices Civils de Lyon. Les cas d’uvéite étaient extraits de la cohorte Lyon Uvéite, comportant 2021 cas d’uvéite au moment de l’étude. Les critères d’inclusion étaient les suivants : patient majeur avec une SEP certaine selon les critères de Mac Donald 2017 et un diagnostic d’uvéite attesté par un ophtalmologiste. Les critères d’exclusion étaient les suivants : toute autre cause documentée d’uvéite infectieuse ou inflammatoire dont sarcoïdose, pseudo-uvéite, néoplasique ou iatrogène. Les témoins étaient appariés avec un ratio de 1:3 sur l’âge, le sexe et la forme clinique de SEP, à partir de la cohorte lyonnaise de SEP.
Résultats |
Au total, 35 cas (29 femmes et 6 hommes) de SEP avec uvéite ont été identifiés. L’âge moyen au diagnostic d’uvéite était de 35,8ans (± 11,3). Les patients étaient majoritairement d’origine caucasienne (51,4 %) ou d’Afrique du Nord (48,6 %). Les uvéites étaient diagnostiquées avant (45 %), de façon concomitante (17,1 %) ou après (37,1 %) le diagnostic de SEP. L’uvéite était principalement bilatérale (68,6 %), chronique (94,3 %), granulomateuse (45,7 %), synéchiante (42,6 %) et s’accompagnait souvent d’une vascularite veineuse (42,9 %), rarement occlusive (5,7 %). On distinguait 2 principaux phénotypes : une forme intermédiaire chronique (31,4 %) et un phénotype sarcoïdosique (42,9 %), définie comme l’ensemble des uvéites antérieures granulomateuses (17,1 %) ou panuvéites granulomateuses (25,7 %) chroniques. La forme rémittente-récurrente était la plus fréquente (80 %). Les atteintes neurologiques étaient sensitive (57,1 %), motrice (40 %) puis cérébelleuse (22,6 %). Une névrite optique rétro-bulbaire était présente dans 37,1 % des cas et concomitante à l’uvéite dans 2 cas. Il existait une proportion significativement plus élevée de sujets d’origine nord-africaine chez les cas par rapport aux contrôles (48,6 % vs 20,6 %, p=0,006). La probabilité chez ces patients d’appartenir au groupe uvéite par rapport aux témoins était 3,51 supérieure. Après un suivi médian de 15ans [14 ; 16] dans le groupe uvéite et de 15ans [12 ; 20] dans le groupe contrôle, il n’y avait pas de variation significative de l’EDSS (3 [1,00 ; 4,50] groupe uvéite vs et 3 [1,00 ; 4,50] groupe contrôle) (p=0,823).
Discussion |
Dans notre étude, l’uvéite associée à la SEP pouvait prendre une forme intermédiaire et chronique, généralement bilatérale. Elle pouvait également prendre l’aspect d’un phénotype sarcoïdosique, à savoir antérieur ou panuvéitique, chronique et granulomateux. Elle affectait le plus souvent des femmes, jeunes. Notre étude montre que les patients atteints d’uvéite associée à la SEP sont plus souvent originaires d’Afrique du Nord avec un odd ratio à 3,51. Génétiquement, la SEP et les uvéites intermédiaires sont associées à l’haplotype HLA-DRB1*15:01 et au polymorphisme du gène IL-2RA [1 ]. Cet haplotype a été identifié de façon plus fréquente chez les patients atteints de SEP originaire des régions du Nord et de l’Est de l’Afrique, notamment en Turquie, en Iran mais aussi au Maroc, ce qui pourrait en partie rendre compte de nos résultats. Contrairement à la récente étude de Martin et al. [3 ], nos résultats montrent un pronostic neurologique identique des SEP avec et sans uvéite, concordant avec l’étude de Le Scanff et al. [2 ].
Conclusion |
La SEP associée à une uvéite était plus fréquente chez les patients d’origine nord-africaine. L’uvéite était bilatérale, chronique et intermédiaire ou de phénotype sarcoïdosique, chronique, granulomateuse. Le pronostic neurologique ne différait pas des SEP sans uvéite.
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Vol 45 - N° S1
P. A83 - juin 2024 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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