Glomérulonéphrite à dépôts de C3 avec anticorps anti-facteur H : une présentation néphrologique rare de la maladie associée aux IgG4 - 08/06/24
Résumé |
Introduction |
La maladie associée aux IgG4 (MAG4) est une pathologie fibro-inflammatoire systémique. L’histologie est la pierre angulaire du diagnostic, avec la mise en évidence d’un infiltrat lymphoplasmocytaire IgG4 positif et l’élimination des diagnostics différentiels. Une atteinte rénale est associée à la MAG4 chez environ 15 % des patients, essentiellement représentée par des néphrites tubulo-interstitielles, exceptionellement associée à des glomérulonéphrites extramembraneuses. La glomérulonéphrite à dépôts de C3 (GNC3) est caractérisée par une dérégulation de la voie alterne du complément, conduisant au dépôt de C3 dans le glomérule. Plus spécifiquement, un déficit acquis en facteur H dû à la présence d’anticorps anti-facteur H est responsable d’1 % des cas de GNC3.
Observation |
Un patient de 48 ans est admis pour altération de l’état général. Il a pour principal antécédent une dacryoadénite associée aux IgG4 histologiquement prouvée, diagnostiquée il y a un an et demi et traitée par corticothérapie orale, arrêtée il y a 6 mois. Son examen clinique révèle la persistance d’une dacryoadénite bilatérale. Ses examens biologiques retrouvent une insuffisance rénale aiguë (créatininémie 156,8μmol/L), un complément abaissé avec un C3, un C4 et un CH50 effondrés à respectivement 0,05g/L (valeur normale : 0,81–1,57g/L), 0,017g/L (valeur normale : 0,13–0,40g/L) et<20 % (valeur normale : 70–130 %). L’analyse urinaire retrouve une protéinurie abondante d’allure glomérulaire (0,45g/g de créatinine) avec une hématurie macroscopique (122/mm3) et une leucocyturie (19/mm3). Une biopsie rénale retrouve dans l’interstitium un infiltrat dense lymphoplasmocytaire avec une fibrose storiforme et un ratio IgG4/IgG de 20 %. L’examen des glomérules retrouve des dépôts endomembraneux avec double-contour, un immunomarquage positif pour le C3 conduisant au diagnostic de GNC3. Le facteur H est abaissé (12,5 % ; valeur normale : 65–140 %) et des anticorps anti-facteur H sont retrouvés (20 000UA ; valeur normale<100UA). Malgré l’introduction d’une corticothérapie orale à 60mg par jour de prednisone, deux perfusions de rituximab (1000mg à 15 jours d’intervalle) et l’introduction d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, le patient présente un syndrome néphritique avec une insuffisance rénale aiguë (créatininémie : 400μmol/L) et une protéinurie glomérulaire (6,1g/g). Une deuxième biopsie est réalisée et retrouve des croissants de proliférations extracapillaires avec des lésions de GNC3 sans infiltration interstitielle. Un traitement par perfusions mensuelles de cyclophosphamide (600mg/m2) pendant 6 mois est débuté. À trois mois, la protéinurie est négative, la créatininémie a diminué (223μmol/L) et l’anticorps anti-facteur H est indosable. Une perfusion d’entretien de rituximab à 500mg est effectuée un an après la première administration. Aux dernières nouvelles, 18 mois après, le patient était en rémission clinique et biologique de sa MAG4 et de sa GNC3.
Discussion |
La néphropathie associée aux IgG4 est quasiment toujours tubulo-interstitielle, mais peut impliquer le glomérule dans 16 % des cas, dans un contexte de glomérulonéphrite extramembraneuse. La présence d’un double-contour et la forte positivité du marquage mésangial et endomembraneux pour le C3 nous a conduit au diagnostic de GNC3. À notre connaissance, un seul cas de GNC3 associée à une MAG4 a été décrit, sans caractérisation de l’étiologie de la glomérulopathie [1 ]. L’originalité de notre cas repose sur la mise en évidence d’un anticorps anti-facteur H dans l’étiologie de la néphropathie. En revanche, cette association a déjà été rapportée dans un contexte de syndrome hémolytique et urémique [2 ]. La physiopathologie de la MAG4 repose sur l’infiltration fibro-inflammatoire par des lymphocytes et des plasmocytes IgG4+ et non sur une pathogénicité directe des IgG4. Néanmoins, ont été décrit de manière exceptionnelle d’authentiques maladies associées aux IgG4 avec des auto-anticorps d’isotype IgG4 pathogènes (hémophilie acquise, SHU, PTT, PTI, GEM), pouvant suggérer une sélection de certains clones plasmocytaires-IgG4+ auto-réactifs. La détermination de la sous-classe (IgG4 ?) de l’anticorps anti-facteur H reste à déterminer dans notre cas et est en cours d’exploration.
Conclusion |
Le développement d’auto-anticorps anti-facteur H responsable d’une C3GN est une complication rénale exceptionnelle de la MAG4, traitée avec succès par cyclophosphamide. Un lien physiopathologique entre les IgG4 circulantes et la présence de l’anticorps anti-facteur H reste à déterminer dans ce contexte.
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Vol 45 - N° S1
P. A244-A245 - juin 2024 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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