Lorsque le rituximarbre cache la forêt - 08/06/24
Résumé |
Introduction |
La maladie de Lyme, infection à spirochète, est l’infection transmise par les tiques la plus courante aux États-Unis et en Europe [1 ]. Elle est principalement causée par Borrelia burgdorferi aux États-Unis et par B. afzelii, B. burgdorferi, et B. garinii en Europe et en Asie. Le diagnostic repose sur un tableau clinique évocateur chez des patients exposés à des tiques porteuses de la maladie de Lyme et, pour les formes disséminées, une sérologie sanguine positive [2 ]. Dans certains cas, cette sérologie peut être prise en défaut, à l’origine d’une errance diagnostique. Nous rapportons ici le cas d’une maladie de Lyme avec atteinte systémique sévère notamment neurologique et cutanée pour laquelle la sérologie était cependant négative à plusieurs reprises.
Observation |
Nous rapportons ici le cas d’une patiente d’une cinquantaine d’années présentant comme principal antécédent un lymphome folliculaire stade IV traité par 6 cures d’obinutuzumab+cyclophosphamide+doxorubicine+vincristine+prednisone suivies d’un traitement d’entretien par obinutuzumab bimestriel pendant deux ans. Au décours de la 11ème cure d’obinutuzumab, alors qu’elle est toujours en rémission complète, la patiente présente un placard érythémateux, induré, annulaire d’évolution centrifuge du sein droit, des arthralgies d’horaire inflammatoire touchant poignets, coudes, chevilles et genoux, et un fébricule. Une biopsie cutanée est réalisée mettant en évidence un infiltrat lymphohistiocytaire non spécifique avec une composante granulomateuse sans nécrose. Le tableau clinique s’enrichit rapidement avec l’apparition de paresthésies dans les territoires des nerfs V, C2, et C3 droits puis un syndrome méningé avec ataxie proprioceptive, déficit moteur proximal des membres, paresthésies des mains, aréflexie diffuse, diplopie horizontale binoculaire et œdème papillaire bilatéral au fond d’œil sans signe d’hypertension intracrânienne. En parallèle, la patiente présente plusieurs poussées cutanées avec des lésions annulaires, bien limitées, d’évolution centrifuge intéressant le sein droit, les membres inférieurs et supérieurs et l’abdomen (Fig. 1). Le bilan biologique retrouve une cytolyse hépatique à 7N et une cholestase non ictérique à 10N conduisant à une ponction biopsie hépatique qui retrouve un aspect d’hépatite lobulaire avec granulomes épithélioïdes sans envahissement lymphomateux. Un bilan étiologique extensif est réalisé avec dans le sang, un large panel de sérologies virales, bactériennes (incluant la sérologie des borrélioses) et parasitaires, plusieurs PCR virales, bactériennes et prélèvements bactériologiques dont une recherche de mycobactéries. L’IRM cérébrale et médullaire met en évidence à deux reprises une prise de contraste des racines C2, C3, et C4 droits ainsi que des nerfs crâniens III et VI gauches. Les différentes ponctions lombaires retrouvent une méningite avec une formule panachée, et dont les cultures, PCR virales, recherche de bandes oligoclonales, recherche de cryptocoque sont toutes négatives ; on retrouve cependant un taux élevé d’IL6 et d’IL10 dans le LCR sans anomalie à l’immunophénotypage lymphocytaire. La TEP-TDM ne montre rien en dehors d’un hypermétabolisme cutané du sein droit. Devant le tableau de granulomatose systémique avec aggravation progressive, une corticothérapie à forte dose est débutée ainsi qu’une quadrithérapie antituberculeuse sans amélioration franche de la symptomatologie. Finalement, un NGS infectieux dans le LCR revient positif à borrelia afzelii, diagnostic confirmé au centre national de référence des borrélioses avec une PCR spécifique dans le LCR et sur biopsie cutanée. La patiente est alors traitée par ceftriaxone IV (2g par jour) 21jours permettant une résolution complète de la symptomatologie (Fig. 1).
Conclusion |
La maladie de Lyme peut avoir une présentation protéiforme et doit être évoquée devant des tableaux cutanés et/ou neurologiques compatibles. La sérologie sanguine et dans le LCR est l’examen de première intention avec une bonne sensibilité et spécificité, néanmoins elle peut être mise en défaut dans une situation de lymphopénie B, notamment après traitement récent par anti-CD20, et doit conduire à la réalisation d’autres techniques pour ne pas méconnaître le diagnostic. Un cas similaire de neuroborréliose séronégative chez un homme traité par R-CHOP pour un lymphome a été précédemment rapporté [3 ].
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Vol 45 - N° S1
P. A218 - juin 2024 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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