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La mystérieuse histoire d’une maladie infectieuse génétique - 08/06/24

Doi : 10.1016/j.revmed.2024.04.157 
V. Dahdah , K. Chevalier, P. Cacoub, L. Alexandre
 Médecine interne et immunologie clinique, hôpital Pitié-Salpêtrière, boulevard de l’Hôpital, Paris, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

Les maladies à prions, ou encéphalopathies spongiformes subaiguës transmissibles (ESST), existent sous trois formes différentes : la maladie de Creutzfeld-Jakob (MCJ) sporadique, forme la plus fréquente (>85 %) ; les ESST génétiques (<10 %) avec la MCJ génétique, l’insomnie fatale familiale et le syndrome de Gerstmann-Sträussler-Scheinker ; les ESST acquises (5 %) avec le Kuru, la MCJ iatrogène et la variante de la MCJ [1]. Entité pathologique bien connue mais très rare (dont l’incidence est estimée à 1 cas par million d’habitants), le diagnostic d’ESST est à évoquer devant des troubles cognitifs d’évolution rapide. Nous rapportons ici le cas d’une MCJ génétique au sein d’un cluster familial.

Observation

Nous rapportons ici le cas d’un patient d’une cinquantaine d’années ayant comme principaux antécédents une bouffée délirante aiguë à l’adolescence suite à la consommation de cannabis et un syndrome dépressif justifiant l’introduction récente d’un antidépresseur. Sur le plan familial, il est rapporté une MCJ d’origine génétique (mutation E200K) chez le père du patient avec, à l’interrogatoire de la famille, plusieurs autres cas familiaux du côté paternel.

Un premier contact médical permettait d’objectiver d’un déclin cognitif rapide (<1 mois), associant troubles phasiques avec manque du mot, ralentissement psychomoteur, syndrome frontal, désorientation temporo-spatiale, inversion du rythme nycthéméral, troubles du comportements moteurs en sommeil paradoxal, somniloquie, ataxie cérébelleuse et syndrome pyramidal. Une première IRM cérébrale objectivait des anomalies initialement décrites comme non spécifiques, conduisant cependant à une hospitalisation dans notre service. La relecture de la première IRM et une seconde IRM cérébrale permettaient alors d’évoquer d’emblée une MCJ avec la présence d’hypersignaux diffusion en hyposignal ADC et FLAIR corticaux bilatéraux à prédominance hémisphérique gauche touchant également la tête du noyau caudé homolatéral (Fig. 1, panel A). En parallèle, le bilan biologique ne retrouve aucune piste pour un diagnostic différentiel avec notamment l’absence d’argument pour une encéphalite auto-immune (anticorps anti-neuronaux sang et LCR), une encéphalite d’Hashimoto (anti-TPO, anti-Tg), une encéphalite liée au VIH, ou encore une neurosyphillis. L’EEG quant à lui retrouve des figures épileptiques diffuses survenant de façon périodique à période courte (aspect décrit en « tracé ECG », Fig. 1, panel B). La ponction lombaire ne retrouvait pas de cellules, mais mettait en évidence une hyperprotéinorachie à 0,5g/L, une normoglycorachie, un dosage de protéines Tau phosphorylées à 40pg/mL (norme<60), un dosage de protéines Tau totales à 3800pg/mL (norme<450pg/mL) et un dosage de la protéine 14-3-3 positif. Le tableau clinique permet de satisfaire les critères diagnostiques du CDC 2018 [2] de MCJ probable, le diagnostic de certitude ne pouvant être apporté que par l’autopsie. Le RT-QuIC n’a pas été fait après avis du CNR puisqu’il l’estimait inutile d’après ces critères. La recherche génétique du gène PRNP n’a pas été acceptée par la famille.

Conclusion

La mutation E200K du gène PRNP est l’une des plus fréquemment retrouvées dans les MCJ génétiques. De transmission autosomique dominante, elle a la particularité d’avoir une pénétrance approchant les 100 % au-delà des 80 ans [3]. Ce cas illustre l’intérêt de la recherche d’antécédents familiaux à l’interrogatoire ; et également le risque d’une MCJ chez un patient avec dégradation neurologique rapide et antécédents familiaux de MCJ.

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