Un cas de mycosis fongoïde CD4/CD8 doublement positif et spontanément régressif après la biopsie - 08/06/24
Résumé |
Introduction |
Le mycosis fongoïde (MF) est le plus fréquent des lymphomes T cutanés primitifs. Typiquement, il exprime un phénotype immunohistochimique CD4+/CD8−. Il se distingue dans la majorité des cas par une évolution chronique indolente. Sa régression spontanée est possible mais rare. Nous rapportons un cas de MF présentant à la fois une co-expression de CD4 et de CD8 et une évolution spontanée vers la régression après la biopsie.
Observation |
Un homme âgé de 22 ans sans antécédents pathologiques notables nous a consulté pour des plaques érythémateuses prurigineuses au niveau du tronc et des membres supérieurs évoluant depuis 2 mois dans un contexte d’apyrexie. Il n’y a avait pas de notion de nouvelle prise médicamenteuse ni d’application d’un nouveau topique. L’examen cutané a objectivé la présence de multiples plaques érythémateuses, infiltrées, papuleuses par endroits, à contours déchiquetés, dont la plus grande mesurait 9cm de grand axe, situées au niveau du tronc, des coudes et des faces postérieures des avant-bras. Nous avons noté également la présence de quelques macules cocardiformes au niveau de la face dorsale des deux mains. Par ailleurs, il n’y avait pas d’atteinte muqueuse ni phanérienne et le reste de l’examen était sans anomalies. La biopsie cutanée a montré un épiderme d’épaisseur normale, un derme occupé par une prolifération tumorale lymphomateuse agencée en bande sous-épidermique discontinue avec un épidermotropisme basal par endroits. De point de vue cytologique, les lymphocytes sont atypiques, augmentées de taille avec des noyaux irréguliers de type Sézary. Le profil immunohistochimique des lymphocytes atypiques était : CD3(+), CD20(−), CD30(−), CD4(+), CD8(+). L’étude de clonalité lymphocytaire a montré un réarrangement monoclonal du gène TCRG des chaines gamma des récepteurs T. Donc le diagnostic retenu était celui d’un lymphome T cutané de type mycosis fongoïde doublement positive CD4+/CD8+. On a complété avec un bilan d’extension : le bilan biologique et la TDM TAP étaient sans anomalies. Donc selon la classification TNMB du MF notre cas était classé : T1bN0M0B0 et stade IA. L’évolution a été marquée par la régression rapide spontanée de toutes les plaques au bout de deux semaines d’évolution en laissant une hyperpigmentation résiduelle.
Discussion |
La co-expression de CD4 et de CD8 dans le MF est rare. Seulement 18 cas ont été rapportés dans la littérature dont le premier a été publié en 2012 par Knapp et al. Un seul cas présente une localisation extra-cutanée : c’est celui rapporté par Yo Kaku et al à propos d’un MF ichtyosiforme avec une atteinte ganglionnaire, sanguine et cardiaque. Pour confirmer ce phénotype, les auteurs recommandent d’utiliser la microscopie confocale ou la cytométrie en flux en plus de l’immunohistochimie. Une étude italienne prospective monocentrique a été menée en 2014 par De Marchi et al. afin de déterminer si la co-expression de CD4 et de CD8 avait un impact sur le pronostic. Ils ont étudié 30 patients nouvellement diagnostiqués, n’ayant jamais reçu de traitement et présentant un MF. Dix (33,3 %) patients présentaient des tumeurs à double expression CD4/CD8. Les patients ont été suivis pendant une durée médiane de 42 mois. Ils ont constaté que la coexpression de CD4 et CD8 était associée à un taux de progression de la maladie légèrement inférieur par rapport au phénotype conventionnel (10,0 % contre 27,8 %). En ce qui concerne la régression spontanée des lésions, elle est fréquente dans les lymphoproliférations T cutanées CD 30(+) et notamment le lymphome T anaplasique à grandes cellules. Dans le MF, elle est rare mais reste possible et les facteurs prédictibles d’une telle évolution ne sont pas encore identifiés. Des cas de régression spontanée de MF après infection au SARS-CoV-2 et au VIH ont été rapportés. Ceci peut être expliqué par l’effet cytotoxique de ces virus sur les cellules néoplasiques.
Conclusion |
Notre cas se distingue d’une part par la double expression CD4/CD8 qui est un phénotype immunitaire peu courant par rapport au phénotype conventionnel CD4+/CD8−. Cette coexpression semble s’accocier à une progression plus lente de la maladie mais c’est une donnée qui reste à confirmer par d’autres études. D’autre part, notre cas est particulier par son évolution vers la régression spontanée qui est également rare dans le MF.
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Vol 45 - N° S1
P. A154 - juin 2024 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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