Intégrée récemment dans la pratique médicale, la téléexpertise (TE) doit permettre une meilleure collaboration entre les professionnels de santé via des avis spécialisés asynchrones pour répondre au déficit de médecins dans certains territoires. L’avenant 7 à la convention médicale en 2022 a élargi les possibilités et a simplifié les conditions réglementaires de prise en charge, ce qui permet en Rhumatologie de pouvoir proposer ces dispositifs à large échelle en soins primaires, sous réserve de démontrer leur efficience.

Évaluation rétrospective à 3 ans (2020 à 2022) d’un dispositif mis en place par l’Agence régionale de santé de Bourgogne Franche-Comté qui permet aux médecins généralistes bourguignons de bénéficier de TE avec le service de Rhumatologie du CHU de Dijon (4 rhumatologues participants). Depuis janvier 2020, la plateforme régionale de Télémédecine Telmi a permis le déploiement progressif de la TéléRhumatologie accessible à tous les médecins généralistes libéraux (MG) (MG isolé, maison de santé pluriprofessionnelle (MSP), médecin en EHPAD). Une fiche standardisée de renseignements cliniques et de questions ouvertes a été créée, avec la possibilité de mettre en ligne les imageries du patient sur un viewer dédié de la plateforme. Les données démographiques, l’activité en termes de demandes TE, le type d’avis (diagnostic, examens complémentaires, prise en charge), la répartition géographique des demandes, la distance kilométrique moyenne évitée (domicile-CHU), les types de pathologies (mécaniques, inflammatoires, etc.), le temps de réponse médian, le nombre de consultation présentielle après TE ont été recueillis sur cette période.

Au total, 329 TE ont été réalisées en 3 ans (malgré l’impact de la crise Covid) avec augmentation progressive du nombre de médecins requérants (32 centres de TéléRhumatologie ouverts début 2023, grande majorité de MSP) et du nombres d’actes de TE (10 à 15 mois actuellement). Cela a évité un trajet Aller/Retour pour le patient (âge moyen 60 ans) de 251km en moyenne. Le délai de réponse médian à la TE était de 3heures. 28 % ont abouti à une consultation en présentielle au CHU de Dijon (24 % auprès d’un rhumatologue, 4 % auprès d’un autre spécialiste). 57 % contenaient des imageries spécialisées (TDM, IRM, DMO) pour relecture, en plus de la fiche standardisée. 99 % des TE concernaient des patients non connus en Rhumatologie et 98 % de pathologies rhumatologiques non ALD : 81 % de pathologies mécaniques (arthrose, tendinopathies, rachialgies, syndromes canalaires) et 19 % de pathologies inflammatoires (rhumatismes inflammatoires chroniques, PPR, arthrites microcristallines). La demande comprenait 10 % d’avis diagnostique, 3 % la stratégie d’examens complémentaires, 51 % la prise en charge de pathologies rhumatologiques identifiées et 31 % étaient mixtes. Il existait des disparités significatives en termes de participation à ce dispositif entre les quatre départements et entre les centres participants, après ajustement à leur date d’intégration.

De tels réseaux de Téléexpertise permettent l’accès rapide via une plateforme sécurisée et gratuite à des avis rhumatologiques asynchrones pour les médecins généralistes, ce qui permet d’affiner le diagnostic, de filtrer les demandes, de proposer des prises en charge personnalisées et d’éviter de longs déplacements pour des patients fragiles. Ces nouvelles modalités de télémédecine facilitent les coopérations interprofessionnelles mais restent encore peu utilisées en pratique rhumatologique alors qu’elles sont appréciées par ceux qui y ont recours (médecins requérants, experts et patients).