L’anatomie au chevet de l’Histoire - 18/11/23
Résumé |
Enseigner l’anatomie, c’est éduquer le regard par l’image et éveiller l’esprit par le verbe. Le tableau est la scène devant laquelle se déploie le théâtre anatomique, où chaque trait de craie souligne une notion morphologique cardinale et où chaque couleur met en emphase une nature, un système ou une fonction.
La leçon terminée, le tableau reste, transitoirement, dans le regard de l’apprenant, un panorama éphémère de la région enseignée que l’étudiant d’aujourd’hui s’empresse de fixer dans la mémoire virtuelle, instantanée, de son téléphone portable. Afin que ce paysage anatomique se perpétue dans sa mémoire vive, durable, il faut que cette composition picturale, accompagnée d’un récit, tous deux savamment pensés pour se glisser dans les plis de la mémoire, soit incarnée. L’anecdote clinique, ajoutée à la rigueur de la description, éclaire la pertinence d’un détail de forme ou d’un rapport cardinal ; elle remplit ainsi parfaitement cette fonction. Encore faut-il qu’elle soit accessible à l’étudiant au début de son apprentissage, qui n’a jamais rencontré un malade et ignore encore tout de la pathologie, de la sémiologie, de l’imagerie médicale et des voies d’abord chirurgicales. L’intelligence consiste alors à le convoquer, au terme de chaque leçon, comme un compagnon accompagnant son maître dans l’univers de la mémoire collective, au chevet des grandes figures de l’Histoire, tantôt malades, blessées ou agonisantes. Celles-ci sont nombreuses et les hasards heureux de la destinée ont voulu que beaucoup d’entre elles fussent soignées par nos prédécesseurs dont les patronymes illustres parsèment encore les voûtes du panthéon anatomique. Chaque anecdote ainsi glanée au chevet des Valois, Bourbons, Bonaparte ou de Gaulle, permet de revenir sur le tableau anatomique et de lui donner chair, au propre, comme au figuré, dans le registre de l’application concrète d’une connaissance qui en devient ainsi instantanément aimable, surtout lorsqu’en conclusion, après l’étonnement, elle fait sourire. L’anecdote tirée du passé est aussi l’occasion d’évoquer à travers les mérites des Vésale, Paré, Bichat, Vicq d’Azir, la Peyronie, Louis, Larrey, Bell, Cruveilhier, Nélaton, Dupuytren et autres, les grandes et nobles valeurs qui ont animé, corps et âmes, ceux dont nous sommes les humbles héritiers et passeurs de mémoire. La mémoire étant portée par les ressorts anatomiques et physiologiques de l’émotion, c’est en engendrant de telles émotions face au tableau et sur l’écran de projection, qu’entre tradition et modernité, nous persévérons à faire de notre discipline, souvent décriée par nos collègues de l’échelle moléculaire, une science réellement vivante. Se déroulant tel un voyage imaginaire de région en région, notre lecture, tenter d’en donner, au gré d’anecdotes choisies, l’illustration visuelle et parlante.
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Vol 107 - N° 359S
Article 100612- décembre 2023 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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