Syndrome d’activation macrophagique associé aux inhibiteurs du checkpoint immunologique : étude de pharmacovigilance et revue de la littérature - 18/06/23
Résumé |
Les inhibiteurs du checkpoint immunologique (ICI), commercialisés depuis bientôt une dizaine d’années, ont montré leur efficacité dans un nombre d’indications de plus en plus importantes. En parallèle, il a également été mis en évidence des effets secondaires liés à la restauration immunitaire, notamment des maladies auto-immunes (thyroïdite, colite, myosite…). Des effets secondaires plus rares, non détectés par les études princeps, ont été notés depuis l’extension des indications des ICI, mettant en exergue l’importance de la pharmacovigilance. Quelques cas ou séries de cas ont ainsi rapporté des syndromes d’activation macrophagique (SAM) associés aux ICI, complications graves, potentiellement fatales. Nous proposons une analyse de pharmacovigilance et une revue de la littérature afin de décrire ces cas de SAM sous ICI. Nous avons recherché sur Vigibase® (base de l’OMS) tous les cas rapportés de syndrome d’activation macrophagique (hemophagocytic lymphohistiocytosis) d’octobre 2014 à juillet 2022, et effectué des analyses de disproportionnalité pour mieux évaluer le lien avec les ICI. Nous avons ensuite utilisé la base française de pharmacovigilance et les cas décrits dans la littérature pour décrire les caractéristiques cliniques, biologiques et les traitements, et réalisé une revue de la littérature. Sur les 3106 cas de SAM de Vigibase®, 177 (5,7 %) étaient associés aux ICI (dont 30 présents dans la base française). La revue de la littérature a retrouvé 21 cas, dont 13 non présents sur Vigibase®, soit 190 cas inclus au total. Les cas de SAM étaient en lien avec un traitement par pembrolizumab dans 30,2 % des cas, nivolumab dans 21,3 % (33,8 % en combinaison avec l’ipilimumab), le plus souvent en lien avec un mélanome (40 %), un cancer bronchopulmonaire (22,1 %) ou rénal (5,3 %). Ils apparaissaient en moyenne dans les 106jours suivant le début de l’immunothérapie. Les principaux critères biologiques étaient l’hyperferritinémie (83,7 %), la fièvre (81,4 %) et les cytopénies (thrombopénie 76,7 %, anémie 69,8 %). Le traitement consistait le plus souvent en une corticothérapie seule (53,5 %), parfois combiné avec de l’étoposide (13,9 %). Concernant l’évolution, elle était favorable dans plus de la moitié des cas (58,5 % des cas), fatale dans 15,3 % des cas. Les analyses de disproportionnalité ont montré que le SAM était presque 7 fois plus rapporté avec les ICI qu’avec les autres médicaments (ROR=6,58 ; 95 % CI : 5,65–7,66), et près de trois fois plus qu’avec les autres antinéoplasiques (ROR=2,87 ; 95 % CI : 2,44–3,37). Cette étude est la première à rapporter de manière la plus exhaustive possible les cas de SAM sous ICI, via une approche de pharmacovigilance. Elle a permis de mettre en avant le risque semblant plus important avec l’immunothérapie qu’avec d’autres types de traitements, dont les chimiothérapies classiques. Cela impose une vigilance accrue chez des patients exposés aux ICI et ayant possiblement eu des traitements immunosuppresseurs auparavant. Bien qu’il n’y ait pas de comparaison directe avec les cas de SAM hors ICI, la mortalité semble moins élevée dans cette étude par rapport à la mortalité classiquement admise des SAM chez les patients atteints de néoplasie. De plus, le traitement faisait le plus souvent appel à une corticothérapie seule, laissant envisager une plus grande corticosensibilité dans cette situation. Cependant, la description précise des caractéristiques cliniques et biologiques ne concernait qu’une minorité de patient (ceux de la base française de pharmacovigilance et ceux de la littérature). D’autres études nécessitent d’être menées pour mieux déterminer les caractéristiques cliniques, biologiques et l’évolution des SAM sous ICI. Cette étude de pharmacovigilance a permis de mettre en lumière le risque de SAM sous ICI, une complication encore méconnue avec un risque de sous-diagnostic, malgré sa gravité potentielle.
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Vol 44 - N° S1
P. A96 - juin 2023 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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