Neuropathie optique ischémique antérieure aiguë artéritique avec CRP négative, ne pas se laisser tromper par les facteurs de risque vasculaire ! - 18/06/23
Résumé |
L’artérite à cellules géantes (ACG) sans syndrome inflammatoire est une éventualité connue de tous les praticiens, mais rares sont les séries rapportées. Nous présentons deux observations de neuropathie ischémique antérieure aiguë (NOIAAA) afin de rappeler que des facteurs de risque vasculaire importants chez un patient avec baisse brutale de la vision et protéine C-réactive normale ne doivent pas faire méconnaître la possibilité d’une maladie de Horton. Une femme de 83 ans aux antécédents d’insuffisance cardiaque, d’hypertension artérielle, de fibrillation auriculaire, de cancer du sein 20 ans auparavant, de LMMC présente une NOIAA brutale de l’œil gauche avec une acuité visuelle à compte les doigts. Sa CRP est à 1,5mg/L. Elle consulte 15jours après le début des symptômes et rapporte une perte de poids de 14kg sur 3 mois. Il n’y a aucun autre signe d’ACG. La biopsie d’artère temporale est positive et malgré une corticothérapie rapidement entreprise, aucune récupération n’est observée. Un homme 75 ans aux antécédents d’hypertension artérielle et de diabète insulinodépendant présente une NOIAA de l’œil droit, survenue en plusieurs épisodes. Il ne signale aucun autre signe d’ACG et pas de symptômes généraux. Une corticothérapie est entreprise dès l’entrée et la récupération visuelle est rapidement complète. LA CRP est à 2mg/L et la biopsie d’artère temporale reviendra positive. Nos deux patients n’ont pas bénéficié d’écho-doppler des artères temporales. La revue la plus récente de la littérature est réalisée par Marins et al. en 2020 [1 ] (41 patients). Il s’agit d’une méta-analyse et toutes les publications comportant les termes artérite à cellules géantes et CRP ou vitesse de sédimentation normales sont répertoriées entre 1975 et 2019. Quarante et un dossiers sont retenus. Beaucoup d’articles de cette méta-analyse ne comportent que des mesures de vitesse de sédimentation et pas la protéine C-réactive. La limite de la VS dans ces cas est en règle générale de 30 à 40mm. Dans cette revue de la littérature, 24/41 des patients ont des signes ophtalmologiques ainsi que des céphalées, plus que le pourcentage habituel de manifestations oculaires rapportées dans l’ACG en général (20 à 50 %). Les signes classiques, tels que fièvre, perte de poids, sueurs nocturnes, asthénie, claudication de la mâchoire, pseudo-polyarthrite rhizomélique sont moins fréquents dans cette population sans inflammation biologique que dans la population « classique » d’ACG. L’hypothèse pour expliquer ces ACG à CRP normale accompagnés de manifestations oculaires est de supposer que, l’œil et sa vascularisation étant une atteinte localisée, les marqueurs inflammatoires ne peuvent être élevés de manière aussi importante que chez un sujet avec manifestations diffuses. Néanmoins, cette supposition ne peut être vérifiée dans toutes les études et n’est pas vérifiée chez notre première patiente. La difficulté est, en effet, de faire un diagnostic de NOIAA artéritique chez un patient présentant des facteurs de risque pour une NOIAA non artéritique, comme chez nos deux patients : sexe masculin, HTA, tabac, hyperlipidémie, diabète, coronaropathie, apnée du sommeil, présence d’une thrombophilie, etc. [2 ]. Outre les facteurs généraux, il existe des facteurs de risque ou d’orientation ophtalmologiques pouvant faire évoquer une NOIAA artéritique : présence d’épisodes de troubles visuels transitoires récents, baisse d’acuité visuelle profonde, papille excavée, tout signe d’ischémie en dehors du territoire des artères ciliaires courtes postérieures, une atteinte bilatérale d’emblée, une association à une atteinte oculomotrice [3 ]. La survenue d’une NOIAA sans syndrome inflammatoire chez un patient de plus de 60 ans, même en présence de facteurs de risque vasculaires classiques, doit faire évoquer une ACG, compte tenu du pronostic oculaire qui dépend de la prise en charge thérapeutique rapide. Une analyse très soigneuse des signes généraux et ophtalmologiques est requise dans tous les cas.
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Vol 44 - N° S1
P. A158 - juin 2023 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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