Atteinte hépatique d’une leucémie à grands lymphocytes granuleux : une présentation clinique rare de mauvais pronostic - 18/06/23
Résumé |
Introduction |
La leucémie à grands lymphocytes granuleux (leucémie LGL) est un syndrome lymphoprolifératif caractérisé par une expansion monoclonale de grands lymphocytes avec un phénotype T CD3+ CD57+ ou natural killer (NK) CD3− CD56+. La maladie est souvent indolente ou associée à des pathologies auto-immunes. Les formes agressives sont rares, avec des manifestations cliniques principalement liées aux cytopénies. L’atteinte hépatique est encore plus rarement décrite, nous en rapportons un cas.
Un homme de 78 ans était hospitalisé en août 2020 pour ictère et distension abdominale. Dans ses antécédents, on notait un tabagisme sevré à l’âge de 70 ans. Il ne prenait pas de traitement médicamenteux au long cours.
L’examen clinique notait un ictère cutanéo-muqueux, une ascite, des oedèmes des membres inférieurs. Il n’y avait pas d’adénopathies périphériques ni d’organomégalie palpable. Le bilan biologique montrait une hémoglobine à 8,2g/dL, plaquettes à 125G/L, leucocytes à 7,4G/L, polynucléaires neutrophiles à 1,3 G/L, lymphocytes de type LGL à 3,5G/L, réticulocytes à 184G/L, haptoglobine<0,10g/L. Le test de Coombs direct était négatif. Il n’y avait pas de schizocytes au frottis sanguin.
La bilirubine totale était à 135μmol/L avec bilirubine conjuguée à 115μmol/L, ASAT à 73 UI/L, ALAT 43UI/L, TP 67 %, albumine à 26g/L, CRP 4mg/L. Les sérologies VHB, VHC, VHE, VIH étaient négatives, les anticorps anti-LKM1, anti-actine et anti-muscle lisse négatifs.
Le scanner thoraco-abdomino-pelvien montrait une hépatomégalie, sans lésion focale, avec flèche hépatique à 14,5cm, une splénomégalie à 15cm et une ascite.
L’analyse cytologique du liquide d’ascite n’a pas montré de cellules tumorales.
Le myélogramme notait une infiltration par une population de grands lymphocytes granuleux, de phénotype NK CD3−/CD56+. L’immunophénotypage sanguin montrait également des cellules NK CD3−/CD56+.
Devant l’absence d’autre étiologie d’hépatopathie mise en évidence, une biopsie du foie était effectuée, concluant à une infiltration par une lymphoprolifération avec des lymphocytes exprimant les marqueurs T cytotoxiques granzyme B et TIA1, il était évoqué à une localisation de la leucémie LGL.
Un traitement par cyclophosphamide était discuté, mais malheureusement l’évolution clinique a été marquée par une bactériémie à Staphylocoque aureus méti-S, avec aggravation de l’insuffisance hépato-cellulaire, dont l’issue a été défavorable.
La leucémie LGL est considérée comme rare mais probablement sous estimée en raison de formes cliniques indolentes. Elle est parfois associée à des maladies auto-immunes comme la polyarthrite rhumatoïde ou les cytopénies auto-immunes. La neutropénie et les infections constituent les principales complications. Les formes agressives sont rares et de mauvais pronostic, et concernent surtout le phénotype NK. Le traitement repose sur des immunosuppresseurs comme le cyclophosphamide, le méthotrexate, la ciclosporine, avec une efficacité inconstante.
L’envahissement de la rate et du foie est décrit avec des observations ayant surtout documenté une atteinte histologique. Dans une cohorte française de 229 patients avec leucémie LGL, comprenant 28 patients avec leucémie LGL à cellules NK, l’hépatomégalie était notée dans 10 % des cas, et la splénomégalie dans 24 %. Cependant, l’atteinte hépatique est peu décrite comme présentation clinique initiale, à notre connaissance, une observation a été rapportée concernant un patient avec ictère, avec une histologie douteuse avec une hépatite auto-immune.
L’originalité de notre observation est la présentation clinique évoquant une hépatopathie avec cholestase et hypertension portale. Les anomalies de l’hémogramme associées ont permis d’orienter le diagnostic, qui a été confirmé au myélogramme.
Conclusion |
Les leucémies LGL agressives sont rares, et souvent associées avec le phénotype NK. L’infiltration hépatique fait partie des atteintes possibles avec une présentation clinique parfois trompeuse et qui semble être de mauvais pronostic.
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Vol 44 - N° S1
P. A136 - juin 2023 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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