Cet article entend revenir sur les représentations qu’ont les médecins généralistes des opioïdes forts et faibles au moyen d’une série d’entretiens semi-directifs afin de comprendre leurs pratiques de prescription de ces deux ensembles d’antalgiques. Les omnipraticiens partagent encore largement des représentations négatives de la morphine, en lien notamment avec les risques de mésusage qu’elle induit, ce qui se traduit par un recours méfiant aux opioïdes forts, sauf pour les médecins qui ont été formés aux soins palliatifs. Si les craintes des généralistes conduisent donc à des prescriptions très mesurées de la morphine, ces représentations ne sont que rarement corroborées par la pratique, puisque rares sont les praticiens qui ont dans leur patientèle des patients qui sont effectivement dépendants à ces substances. À l’inverse, les médecins enquêtés se montrent confiants dans leurs prescriptions d’antalgiques opioïdes faibles alors même qu’ils découvrent plus régulièrement des cas de mésusages (qui concernent souvent le tramadol), dont ils prennent conscience fortuitement et qu’ils peinent à prendre en charge.

This article aims to study the representations of strong and weak opioid analgesics shared by general practitioners, using a series of semi-structured interviews to understand their prescribing practices of these two categories of analgesics. General practitioners still largely share negative representations of morphine, particularly in relation to the risks of misuse. As a result, they are generally wary of prescribing strong opioid analgesics, except for doctors who have been trained in palliative care. If the fears of general practitioners therefore lead to very measured prescriptions of morphine, these representations are rarely corroborated in practice: few practitioners do have patients who are really dependent on these substances. Conversely, general practitioners seem confident in their prescriptions of weak opioid analgesics even though they more regularly discover cases of misuse (especially concerning tramadol), which they find out accidentally and struggle to address.