Myopathie de Becker à révélation tardive : difficultés diagnostiques. À propos de deux observations - 24/11/21

Résumé |
Introduction |
La dystrophie musculaire de Becker est une myopathie génétique rare transmise par le chromosome X (incidence 1/18 000- 1/31 000[SL1] [SL2])secondaire[SL3] à une anomalie de la dystrophine. Son phénotype clinique est très variable. Elle est diagnostiquée habituellement chez l’adulte jeune. Elle peut être asymptomatique, se traduire par une atteinte du muscle strié squelettique ou par une cardiopathie dilatée isolée, ou combiner ces deux atteintes [1 ]. Le diagnostic peut en être difficile, comme en témoignent les deux observations que nous rapportons.
Observation |
Observation 1 : Un patient de 52 ans, ancien rugbyman de haut niveau, avec antécédent de cardiopathie dilatée à coronaire saine découverte à 45 ans, est hospitalisé en Janvier 2011 pour déficit musculaire des membres inférieurs avec chutes à répétition. Le bilan permet de diagnostiquer une hyperthyroïdie à l’amiodarone, mais après retour à l’euthyroïdie, les dosages répétés de CK retrouvent des valeurs entre 2N et 3N. Une dégénérescence graisseuse bilatérale et symétrique des muscles de la ceinture pelvienne (grade 4) et de la ceinture scapulaire (grade 2), est retrouvée à l’IRM. La biopsie musculaire ne permet pas d’orienter le diagnostic. L’expression de la dystrophine parait normale en histo-enzymologie. L’évolution est lentement progressive. En 2017, une étude par western blot est demandée sur la biopsie musculaire initiale, qui retrouve une expression très diminuée de la dystrophine. L’étude génétique indique une délétion des exons 45 à 51 du gène de la dystrophine confirmant le diagnostic de maladie de Becker de l’adulte. Observation 2 Un homme de 57 ans, policier, développe en 2017 et 2018 une fatigabilité musculaire diffuse, prédominant aux cuisses, une dyspnée de stade NYHA III fort, puis des fausses routes, un petit œdème des mains et des douleurs inflammatoires des doigts et des poignets, un phénomène de Raynaud au niveau de deux doigts de la main gauche. Les CK sont élevées à 6N. Les ACAN montrent une fluorescence nucléolaire à 1/1280 sans spécificité anti DNA ou anti-ENA. La recherche des anticorps spécifiques des myosites est négative. Le dosage de l’enzyme de conversion de l’angiotensine est à la limite supérieure de la normale. Le scanner thoracique thoraco-abdomino-pelvien montre des adénopathies médiastinales de 11 à 16mm, bilatérales et symétriques non compressives et les scissures sont le siège de micronodules. La biopsie musculaire montre un aspect de myosite granulomateuse avec quelques cellules géantes, évoquant en premier lieu une sarcoïdose musculaire. L’électrocardiogramme et l’échographie cardiaque sont normales. La présence d’amas nucléaires en nombre anormal justifient la réalisation d’une étude histo-enzymologique. L’immuno-marquage pour la dystrophine est normal. Le diagnostic de sarcoïdose musculaire ou de myosite auto-immune est retenu et un traitement par corticoïdes et méthotrexate (15mg/semaine) est initié permettant une nette amélioration du déficit musculaire et la régression du trouble de la déglutition. Les CK restent élevées à 4N. Son médecin référent est alors frappé par une hypertrophie franche des mollets. Le patient indique que cette anomalie est connue depuis sa petite enfance. Une analyse en western-blot est alors demandée sur la biopsie musculaire, qui confirme un déficit marqué d’expression de la dystrophine. L’analyse moléculaire en séquençage haut débit de 44 gènes impliqués dans les dystrophies musculaires identifie un variant d’épissage de l’exon 41 du gène DMD à l’état hémizygote, nomenclature c.5922+1G>T, entraînant une délétion de l’exon 41 du gène de la dystrophine.
Conclusion |
Nos deux observations illustrent les difficultés du diagnostic de la maladie de Becker à l’âge adulte. Le diagnostic a été retardé dans les deux cas du fait de l’absence de contexte familial évocateur, d’une étude histo-enzymologique normale malgré un marquage par trois anticorps différents, et dans un cas par un tableau clinique et histologique de myosite granulomateuse, possiblement sarcoïdosique, avec un effet favorable des corticoïdes et du méthotrexate. L’aspect anatomopathologique granulomateux n’est pas décrit au cours des dystrophinopathies et ne parait pas devoir être imputé à la dystrophinopathie chez notre patient [2 ]. L’hypertrophie des mollets est un trait clinique d’intérêt mais peu spécifique, qui peut se voir dans plusieurs myopathies génétiques ou dysimmunes [3 ].
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Vol 42 - N° S2
P. A423-A424 - décembre 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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