Caractéristiques et pronostic des patients présentant une diplopie binoculaire révélant une artérite à cellules géantes - 24/11/21

Résumé |
Introduction |
L’artérite à cellules géantes (ACG) est une vascularite des gros vaisseaux dont les complications les plus redoutées sont les atteintes ophtalmologiques afférentes comme les neuropathies optiques ischémiques antérieures aiguës (NOIAA) et les occlusions de l’artère centrale de la rétine (OACR) qui peuvent entraîner une cécité. La survenue d’une complication visuelle efférente avec une diplopie binoculaire est rare dans l’ACG, touchant moins de 15 % des patients et se manifeste par une diplopie transitoire ou persistante, le plus souvent secondaire à une paralysie d’un nerf oculomoteur. Les caractéristiques des patients avec une diplopie ont été décrites dans plusieurs séries de cas mais les données concernant le pronostic et la réponse au traitement sont rares. L’objectif de cette étude était d’étudier les caractéristiques des patients se présentant avec une diplopie binoculaire au diagnostic d’ACG et d’évaluer le pronostic de la diplopie après initiation du traitement.
Patients et méthodes |
Nous avons mené une étude rétrospective incluant tous les patients présentant une diplopie binoculaire au diagnostic d’ACG dans un centre spécialisé en ophtalmologie entre janvier 2015 et avril 2021. Le diagnostic d’ACG reposait sur les critères ACR de 1990 et sur la positivité d’une biopsie de l’artère temporale ou les données d’une IRM haute résolution retrouvant une inflammation des parois vasculaires.
Résultats |
Parmi les 111 patients avec un diagnostic d’ACG, 30 (27 %) présentaient une diplopie binoculaire (transitoire n=3, persistante n=27). La présentation clinique était identique entre les patients avec et sans diplopie. Tous les patients avec diplopie présentaient un syndrome inflammatoire biologique contre 91 % des patients sans diplopie (p=0,06). Le mécanisme de la diplopie était attribué dans la plupart des cas à une paralysie oculomotrice (n=19/24, 79 %), en particulier du III (n=11) et/ou du VI (n=10). Le délai moyen entre le début de la diplopie et le diagnostic d’ACG était de 18 jours. La diplopie avait disparu spontanément avant initiation du traitement chez 6 patients (20 %) ou n’était plus objectivable du fait de complications ophtalmologiques afférentes unilatérales (n=6) ou bilatérales (n=5). Chez les autres patients (n=13), la diplopie a disparu chez 92 % (n=12) avec un délai moyen de 24 jours après initiation des traitements. Le taux de résolution de la diplopie semblait plus important à 7 jours chez les patients traités par corticothérapie IV que par voie orale (60 % vs 25 %) mais identique à 1 mois (60 % vs 75 %) et à 6 mois (100 % vs 88 %). Les patients traités par tocilizumab (n=5) avaient tous une atteinte visuelle afférente grave responsable d’une disparition de la diplopie binoculaire. La durée de suivi moyenne était de 17 mois. Sept patients (23 %) ont présenté une rechute de l’ACG au cours du suivi avec récidive de la diplopie chez seulement 2 patients (29 %), à nouveau résolutive après reprise du traitement.
Discussion |
Les patients présentant une diplopie ne semblaient pas présenter de caractéristiques cliniques spécifiques mais présentaient tous un syndrome inflammatoire biologique. Chez les patients ne présentant pas de complications visuelles, la diplopie évolue favorablement sous traitement avec une disparition progressive de quelques jours à plusieurs semaines, quel que soit le traitement initial choisi (corticothérapie IV ou PO). En raison du faible nombre de patients ayant reçu du tocilizumab, il est difficile de conclure sur une éventuelle efficacité de ce traitement. Même si cela reste rare, la récidive de la diplopie à l’occasion d’une rechute d’ACG est possible mais semble également bien répondre à la reprise du traitement.
Conclusion |
La diplopie n’est pas une situation exceptionnelle au diagnostic d’ACG. Elle requiert l’initiation d’un traitement en urgence car elle peut précéder l’apparition d’une atteinte visuelle afférente qui peut être définitive. L’initiation du traitement permet une récupération complète dans la grande majorité des cas, avec un risque faible de récidive en cas de rechute de l’ACG.
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Vol 42 - N° S2
P. A268 - décembre 2021 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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