Faut-il annoncer un diagnostic de trouble bipolaire à un patient qui n’a jamais connu la dépression ? Une revue systématique actualisée sur la manie récurrente - 10/12/19
If a patient has never experienced depression, should we tell him he has bipolar disorder? An updated systematic review on recurrent mania
pages | 13 |
Iconographies | 1 |
Vidéos | 0 |
Autres | 0 |
Résumé |
Contexte |
Le trouble bipolaire de l’humeur (TB) est une pathologie neuropsychiatrique chronique qui se caractérise le plus souvent par l’alternance d’épisodes dépressifs et d’épisodes maniaques/hypomaniaques. La manie récurrente (MR) est un autre trouble de l’humeur qui se définirait par la présence d’au moins 2 épisodes maniaques/hypomaniaques sans épisode dépressif dans l’histoire du sujet. Cependant, la MR est toujours incluse dans la catégorie du TB selon les classifications d’autorité en psychiatrie. Pourtant, des patients présentant une MR sont décrits depuis plus d’un siècle, et plusieurs études soutiennent que la MR serait liée à une physiopathologie propre avec des débouchés thérapeutiques spécifiques et bien distincts du TB.
Objectifs |
Nous avons conduit une revue systématique actualisée et exhaustive de la littérature afin d’apprécier la prévalence de MR parmi les sujets TB et d’identifier des éléments cliniques permettant de différencier ce diagnostic du TB. De plus, nous avons voulu identifier les biais relatifs aux études sur la MR qui pourraient constituer des pistes de recherche pour, dans l’avenir, mieux conceptualiser et prendre en charge ce trouble.
Sources documentaires |
Une revue systématique des bases de données PubMed, Embase, ScienceDirect et PsychInfo a été réalisée selon les critères PRISMA. Les mots clés suivants ont été utilisés, sans limitation de date : (mania OR manic) AND (unipolar) NOT (depress*) OR (“unipolar mania” OR “unipolar manic” NOT “depress*”).
Sélection des études |
Deux auteurs (B.L., C.D.) ont indépendamment examiné le titre, le résumé ainsi que les mots clés de chaque référence identifiée par cette recherche puis ont sélectionné les études en fonction de critères d’inclusion bien définis. Ensuite, la même procédure a été appliquée pour l’examen du texte intégral de chaque étude éligible. En cas d’incongruence entre les données extraites par les auteurs B.L. et C.D., l’examen et l’avis de l’auteur A.L. ont été sollicités.
Résultats |
Nous avons inclus 23 études pour un total de 1118 patients MR au sein d’un groupe de 4796 patients initialement diagnostiqués TB, avec une prévalence moyenne pondérée de 23,2 % de MR. Les patients MR présentaient des caractéristiques significativement bien distinctes des patients TB en terme de terrain, d’évolution du trouble, de sémiologie et de réponse aux traitements régulateurs d’humeur. Néanmoins, certaines études n’ont pas confirmé ces éléments de distinction entre les deux groupes.
Limites |
La plupart des études sur la MR étaient rétrospectives. La définition de la MR en termes de critères diagnostiques était variable selon les études. Les études rétrospectives portant un diagnostic de MR sur analyse de dossier présentaient le risque de manquer un épisode dépressif dont la présence annulerait le diagnostic de MR. Un biais des études prospectives était la possibilité de ne pas détecter d’épisode dépressif chez les MR du fait de durées de suivi insuffisamment longues.
Conclusion |
Bien que la littérature sur la MR soit fortement hétérogène, certains auteurs font l’hypothèse qu’il s’agirait d’une entité clinique à part entière, distincte du TB. En moyenne, la MR concernerait en effet près d’un patient TB sur 4, mais futures études sont nécessaires pour identifier des spécificités cliniques et paracliniques robustes concernant la MR. Le recueil de davantage de données comparatives entre TB et MR pourrait s’avérer utile pour la pratique clinique et être amélioré par des perspectives méthodologiques.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Summary |
Context |
Bipolar disorder (BD) is a severe and recurrent mood disorder. It is characterized by episodic changes in mood and energy/activity levels that are increased during mania/hypomania or decreased during depression. Recurrent mania (RM) is a mood disorder, which would be defined by at least two manic/hypomanic without depressive episodes. Despite a rich body of clinical descriptions, RM is still not integrated into the latest editions of disease classifications and continues to be subsumed under BD in clinical practice.
Objectives |
We conducted a systematic review of the literature to pool data about RM prevalence within BD groups, identify differences between RM and BD and develop reliable knowledge about specificities of RM. Furthermore, we sought to identify the methodological bias inherent to RM studies.
Method |
Relevant publications were identified by a systematic search of PubMed, Embase, ScienceDirect and PsychInfo databases according to PRISMA criteria, with no limitation of date. The following MESH terms were used: (mania OR manic) AND (unipolar) NOT (depress*) OR (“unipolar mania” OR “unipolar manic” NOT “depress*”).
Results |
Twenty-three (23) of 186identified studies met eligibility criteria for our systematic review. The total sample included 1118RM subjects among 4796BD subjects. The weighted mean of RM prevalence was 23.2%. Compared to BD, RM was characterized by a predominance of men, an earlier age at illness onset, less rapid cycles and seasonal variations, longer manic episodes, less specific clinical features (suicide attempts, anxious disorders, catatonic symptoms, irritability, hyperactivity, racing thoughts), less family history of depression, more addictive comorbidities and worse response to lithium prophylaxis (P<0.05). However, many studies failed to replicate these significant differences.
Limits |
RM studies were mainly retrospective. The major bias of RM studies were the lack of consensus on the defining criteria for RM and the risk of unreported depressive episodes, both in charts that were reviewed in retrospective studies and in prospective studies with insufficient follow-up duration.
Conclusion |
Although the literature on RM remains sparse, many authors agree that RM should be distinguished from BD. RM would concern almost 1 in 4 BD patients. Furthermore, several clinical variables could differentiate this mood disease from BD and may orient the specific therapeutic choice. However, clinical criteria are still not reliable enough to make a diagnosis of RM. Further studies are required to replicate the results of existing studies and to adjust for the effect of methodological biases.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Plan
Vol 48 - N° 11P1
P. 1306-1318 - novembre 2019 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
L’accès au texte intégral de cet article nécessite un abonnement.
Bienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
L’achat d’article à l’unité est indisponible à l’heure actuelle.
Déjà abonné à cette revue ?