Phénotype et pronostic des atteintes systémiques induites sous inhibiteurs de check-points immunitaires - 22/11/19
Résumé |
Introduction |
Actuellement, les inhibiteurs de check-points immunitaires (ICI) sont recommandés pour le traitement de plus de 16 types de cancers différents et le nombre de patients éligibles ne cesse d’augmenter notamment avec l’approbation récente dans le cancer du sein. La gestion des toxicités immunitaires induites par ces anticorps monoclonaux anti-cytotoxic-T-lymphocyte-associated protein-4 (CTLA4) ou anti-programme cell death 1/programme cell death ligand 1 (PD1/PDL1) devient cruciale. En effet, en restaurant l’immunité cellulaire T antitumorale, les ICI peuvent induire des effets indésirables dont la fréquence, le tropisme et la sévérité dépendent notamment des schémas thérapeutiques utilisés. Une étude récente des toxicités cardiovasculaires immuno-induites a montré un risque de mortalité majeur lié aux myocardites. Cependant, les effets indésirables rhumatologiques sont à ce jour peu décrits.
Objectifs |
Identifier et caractériser les toxicités rhumatologiques induites par les ICI à l’aide de la base internationale de pharmacovigilance de l’OMS.
Matériels et méthodes |
À l’aide de la base de pharmacovigilance de l’OMS, nous avons comparé par une analyse de disproportionnalité bayésienne la déclaration des effets indésirables rhumatologiques chez les patients exposés aux ICI à la déclaration de ces effets dans la base de données complète à partir de 2008 (date de la première déclaration d’évènement indésirable sous ICI). Toutes les pathologies systémiques rhumatologiques (à l’exception de la vascularite) ont été incluses selon la définition des termes Medical Dictionary for Regulatory Activities (MedDRA). Les molécules suivantes ont été prises en compte : pembrolizumab, nivolumab, atezolizumab, avelumab, durvalumab, tremelimumab, cemiplimab et ipilimumab. L’association entre effet indésirable et médicament est calculée par l’information component (IC) ou le reporting odds ratio (ROR). La borne inférieure de l’intervalle de confiance à 95 % de l’IC : IC0,25 est significatif si positif.
Résultats |
Nous avons identifié 54 416 effets indésirables rapportés sous ICI (14 988 450 effets indésirables rapportés dans la base depuis 2008). Comparativement à l’ensemble de la base, une association significative entre ICI et effets indésirables rhumatologiques a été mise en évidence pour 6 pathologies : les arthrites (n=606/121 811, ROR 1,4 [1,3–1,5] ; IC0,25 0,45), les myosites (n=465/26 722, ROR 4,9 [4,5–5,4] ; IC0,25 2,12), la sarcoïdose (n= 94/2772, ROR 9,6 [7,9–11,9] ; IC0,25 2,85), la pseudopolyarthrite rhizomélique (n= 76/1504, ROR 14,6 [11,6–18,4] ; IC0,25 3,34), le syndrome de Gougerot-Sjögren (n=49/2000, ROR 6,9 [5,2–9,2] ; IC0,25 2,24) et le sclérodermie (n =17/2385 vs 17, ROR 2,0 [1,2–3,2] ; IC0,25 0,17).
Les patients atteints de myosite étaient plus souvent des hommes (70,4 % ; p<0,0001 par rapport aux autres groupes) et traités avec un anti-PD1/L1 (ROR 12,8 [1,9–4,0] vs anti-CTLA4) ou avec une association d’ICI (ROR 2,03 [1,59–2,59] vs monothérapie). La myosite est le plus précoce des effets indésirables rhumatologiques (délai médian d’apparition : 31 IQR [39] jours, p<0,0001) et le plus grave avec un taux de mortalité de 30,4 % (p<0,0001). Les arthrites et le syndrome de Gougerot-Sjögren avaient un délai d’apparition similaire (respectivement 78,5 [144,2] jours et 88 [98] jours). La sarcoïdose survenait chez des patients plus jeunes (57 [48–65,25] ans) et avec un délai d’apparition plus long (174 [204,2] jours ; p<0,001). La sclérodermie survenait très tardivement après le début de l’immunothérapie (395,5 [133,5] jours ; p<0,001). La majorité de ces complications étaient des évènements de novo en dehors de quelques cas de myosites et d’arthrite. Les arthrites regroupaient des tableaux d’oligoarthrite et polyarthrite, également de polyarthrite rhumatoïde mais très peu de cas de spondylarthropathie. Les myosites étaient les seules associées à des signes oculomoteurs et à une cardiotoxicité.
Conclusion |
Parmi les toxicités rhumatologiques, les myosites sont les plus précoces et les plus graves. Le phénotype des toxicités rhumatologiques diffère des pathologies auto-immunes spontanées et leur type varie selon l’ICI (PD1 ou CTLA-4), ce qui suggère des mécanismes physiopathologiques distincts. Une meilleure connaissance de ces effets indésirables est nécessaire pour si possible les prévenir et améliorer leur prise en charge thérapeutique.
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Vol 40 - N° S2
P. A72 - décembre 2019 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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