La mucormycose orbito-facial et pulmonaire mimant une granulomatose avec polyangéite - 22/11/19
Résumé |
Introduction |
La mucormycose est une maladie fongique rare mais potentiellement mortelle, causée par des champignons filamenteux saprophytes de la classe des zygomycètes. Cela s’est produit surtout chez les patients immunodéprimés. Malgré les nombreux cas signalés dans la littérature, cette maladie mortelle reste mal diagnostiquée et confondue avec d’autres diagnostics. Nous rapportons la cas d’une patiente chez qui cette affection avait mimé une granulomatose avec polyangéite.
Observation |
Une femme de 31 ans a été admise aux urgences pour une acidocétose diabétique inaugurale associée à une dyspnée, douleur thoracique et hyperthermie. L’examen clinique a révélé un Glasgow à 12/15, une hyperthermie à 40° et une pression artérielle basse (90/40 mmgH), une tachycardie (90 bpm) et une tachypnée (30 cpm). Elle avait été admise en unité de soins intensifs. Un scanner thoracique a montré une pneumonie excavée bilatérale sévère. La protéine C réactive était élevé à 300mg/L, un taux élevé de neutrophiles était observé à 30 000 éléments/mm. Elle a donc reçu de la lévofloxacine et de la ceftriaxone par voie intraveineuse.
La correction de l’acidocétose a été menée avec succès. Les résultats bactériologiques des échantillons de fosses nasales, ceux du sang et du liquide aspiré par les bronches étaient négatifs. La patiente a présenté dans les 48heures, un œdème inflammatoire périorbitaire bilatéral s’étendant jusqu’à la partie supérieure de la face médiane, évoluant vers des lésions ecchymotiques et nécrotiques cutanées du milieu de l’hémiface droit, associée à une cécité bilatérale soudaine.
Les premiers antibiotiques ont été poursuivis pendant 4 semaines sans résultat positif. Une bronchoscopie avec biopsies a été réalisée. L’étude histopathologique a montré un infiltrat lymphoplasmocytaire avec présence de cellules géantes évoquant une granulomatose avec polyangéite (maladie de Wegener). La patiente a été admise au département de médecine interne. Une évaluation étiologique complémentaire a été réalisée : les tests immunologiques (C-ANCA, P-ANCA et anticorps antinucléaires sériques ANA) étaient négatifs, le taux de sédimentation érythrocytaire était significativement élevé (150mm au cours de la première heure), la fonction rénale conservée sans sédiment urinaire actif ni protéinurie, le Quantiféron TB gold, les marqueurs tumoraux et les sérologies étaient négatifs. Initialement, les stéroïdes systémiques étaient administrés : bolus de méthylprednisolone (15mg/kg/jour pendant 3jours) relayé par 1mg/kg/jour d’équivalent prednisone pendant deux semaines en raison de la forte suspicion de granulomatose avec polyangéite.
Le résultat a été marqué par une aggravation locale, les corticostéroïdes ont été arrêtés suite à l’apparition d’une perte de substance de la paroi droite de la pyramide nasale, une nécrose cutanée étendue de l’hémiface droite, une nécrose de la muqueuse palatine et une nécrose des os avec apparition de fistule oro-nasale. L’endoscopie nasale a révélé des lésions nécrotiques noires.
Le diagnostic de mucormycose a été posé 6 semaines après son admission à l’hôpital, lorsque la deuxième biopsie des lésions faciales a montré des filaments mycéliens aseptaux prenant la coloration PAS avec absence de granulomes ou d’atypies cellulaires, confortés par l’étude mycologique ayant permis la même observation.
Un traitement à l’amphotéricine B à forte dose (dose de 3mg/kg/jour) a été instauré. Un débridement chirurgical de la cavité nasale et des sinus a été réalisé par rhinotomie latérale.
Après 3 mois de traitement, l’évaluation clinique et radiologique avait montré une évolution stable des lésions faciales et une régression partielle des lésions pulmonaires excavées bilatéralement sur le contrôle CT. Notre patiente avait survécu, mais avec des séquelles : cécité et défiguration du visage.
Conclusion |
Le traitement réussi semble reposer sur le diagnostic précoce, le contrôle de la maladie sous-jacente, la résection chirurgicale radicale et l’administration systémique de l’amphotéricine B. La mucormycose doit être évoquée chez les patients présentant une cellulite orbitale ou péri-orbitale évoluant en lésions ecchymotiques sur un patient à risque, notamment sur le diabète inaugural.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Plan
Vol 40 - N° S2
P. A207-A208 - décembre 2019 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
L’accès au texte intégral de cet article nécessite un abonnement.
Déjà abonné à cette revue ?