Douleurs abdominales en post-partum chez une patiente porteuse d’un syndrome des antiphospholipides - 22/11/19
Résumé |
Introduction |
Au cours du syndrome des antiphospholipides (SAPL), le HELLP syndrome (Hemolysis, Elevated Liver enzymes, Low Platelets), est une complication rare mettant en jeu le pronostic vital maternel et fœtal. Nous présentons le cas d’une patiente avec SAPL primaire, présentant un HELLP syndrome à j4 post-partum.
Observation |
Cette patiente de 34 ans, G2P0 (interruption volontaire de grossesse et fausse couche spontanée précoce), est porteuse d’un SAPL avec triple positivité (anticardiolipine et anti-bêta-2-GP1 à taux modérés, anticoagulant circulant de type lupique), révélé par une thrombophlébite cérébrale en 2015, sans lupus associé, sous warfarine au long cours (INR entre 2 et 3). Elle présente une obésité (IMC à 32,5kg/m2). Elle débute une grossesse en septembre 2018 et reçoit un traitement prophylactique par aspirine 100mg/j, et enoxaparine 0,7mL×2/j à dose curative (activité anti-Xa correcte à 0,5 UI/mL), en relais de la warfarine. Les échographies fœtales de suivi retrouvent un petit fœtus avec apparition de notchs des artères utérines à 21 SA+5 et à 25 SA+5, justifiant l’ajout de l’hydroxychloroquine à 400mg/j à partir de 25 SA+5. À 27 SA+5, devant un retard de croissance intra-utérin avec inversion du rapport ombilico-cérébral et souffrance fœtale chronique, une maturation pulmonaire du fœtus est indiquée, suivie d’une césarienne. L’enoxaparine curative est suspendue le soir précédant la césarienne, sans relais HNF, puis reprise à dose préventive le soir de la césarienne (j0 post-partum) ; la dose curative n’est réintroduite qu’à j1 post-partum au matin, soit un délai de 36heures sans anticoagulation curative efficace. À j4 de la césarienne, la patiente décrit une douleur épigastrique violente avec irradiation sous costale droite résistante aux antalgiques de palier 3. La tension artérielle est à 120/70mmHg. L’ECG est normal. Le bilan biologique retrouve une cytolyse sans cholestase avec ASAT à 62 UI/L (N<32 UI/L) et ALAT à 91 UI/L au maximum (N<32 UI/L), des LDH à 306 UI/L (N 135 à 214 UI/L), l’absence d’anémie et de schizocytes, une haptoglobine normale, une discrète thrombopénie à 120 G/L, un DFG à 118mL/min/1,72 m2, l’absence de protéinurie. Le scanner abdomino-pelvien retrouve de multiples lésions hépatiques hypodenses, correspondant à de probables microthrombi. Un HELLP syndrome incomplet est évoqué : un traitement par solumedrol 120mg/j et héparine IVSE 500 UI/kg/jour permet une régression des douleurs en 24heures. L’IRM hépatique de contrôle à j8 du scanner montre une diminution numérique et volumétrique des images hépatiques diffuses avec persistance des 2 plus volumineuses au niveau du dôme hépatique (respectivement 12 et 10mm contre 25 et 15mm initialement), ceci au sein d’une hépatomégalie non dysmorphique, non stéatosique. Un relais par corticothérapie per os à 1mg/kg est débuté à j15 avec décroissance progressive effectuée sur 3 mois, l’hydroxychloroquine est maintenue, et la warfarine reprise en relais de l’HNF à j8, avec normalisation du bilan hépatique et des plaquettes.
Discussion |
Le HELLP syndrome associé au SAPL est souvent sévère. Le HELLP peut être incomplet et le diagnostic différentiel avec une complication thrombotique du SAPL évoqué. Il se manifeste habituellement au cours du 3e trimestre de grossesse mais est possible en post-partum [1 ]. Chez notre patiente, le contexte d’accouchement prématuré et la fenêtre thérapeutique d’anticoagulants possiblement trop longue sans relais HNF ont pu précipiter l’événement. Par ailleurs, les facteurs prédictifs de complications obstétricales étaient la triple positivité initiale, dans un contexte d’obésité favorisant les complications thrombotiques [2 ]. Les infarctus hépatiques sont une complication rare du HELLP syndrome, du fait de la double vascularisation hépatique artérielle et portale mais semblent plus fréquents en cas de SAPL associé [3 ]. Le traitement du HELLP associé au SAPL n’est pas encore bien codifié ; en pré-partum, l’accouchement permet souvent la résolution des symptômes. Les autres traitements possibles sont les anticoagulants IV et les corticoïdes, les échanges plasmatiques, les transfusions de plasma frais congelé, les immunoglobulines IV, le cyclophosphamide [1 ].
Conclusion |
Le HELLP syndrome dans le cadre du SAPL est une complication rare mais à anticiper d’autant plus chez des patientes triple positives avec facteurs de risque cardiovasculaires associés. L’ajout d’emblée de l’hydroxychloroquine, une cible anti-Xa plus haute à 1 UI/mL et l’augmentation de l’aspirine à 150mg/j peuvent se discuter. Par ailleurs, la fenêtre thérapeutique sans anticoagulation doit être impérativement la plus courte possible.
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Vol 40 - N° S2
P. A180-A181 - décembre 2019 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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