La polychondrite chronique atrophiante (PCA) est une maladie systémique caractérisée par l’inflammation récidivante des cartilages de l’oreille, du nez, des articulations périphériques, du larynx et de l’arbre trachéobronchique. D’autres structures riches en protéoglycanes sont également touchées, les yeux, le cœur, les vaisseaux, l’oreille interne, la peau et les reins. Les complications cardiovasculaires sont observées chez 24 à 52 % des patients selon les séries.

Nous rapportons le cas d’une PCA compliquée d’un anévrysme aortique.

B.M., âgé de 54 ans, hypertendu, consultait en 2016 pour une chondrite du pavillon de l’oreille droite. L’examen anatomopathologique mettait en évidence une chondrite subaiguë à chronique avec un tissu cartilagineux bien différencié entouré par une réaction inflammatoire faite de lymphocytes, plasmocytes et de polynucléaires neutrophiles avec de nombreux vaisseaux sanguins congestifs disposés au sein d’une fibrose dense. L’examen ophtalmologique ainsi que le reste de l’examen somatique étaient sans particularités.

Le diagnostic de PCA a été retenu en appliquant les critères de Damiani et Levine et un traitement par colchicine 1mg/j a été instauré avec une amélioration clinique dès la 2^e semaine du traitement. Le patient était suivi depuis de manière régulière, avec une rémission clinique complète pendant une période de 2 sans. En janvier 2019, le patient a présenté une dyspnée motivant la réalisation d’une radiographie du thorax qui a objectivé une dilatation de l’anneau aortique et un élargissement du médiastin. Une TDM thoracique montrait un anévrysme fusiforme de l’aorte ascendante et descendante jusqu’à la huitième vertèbre dorsale.

Les complications cardiovasculaires de la PCA sont rares, mais représentent la deuxième cause de mortalité, après les chondrites du tractus respiratoire. Les anévrysmes aortiques sont décrits chez environ 5 % des malades atteints de PCA. Ils se développent le plus fréquemment sur l’aorte ascendante et sont alors généralement associés à une dilatation de l’anneau aortique avec insuffisance aortique et dysfonction ventriculaire gauche. Ces anévrysmes peuvent être multiples (50 % des cas dans la série de Cipriano et al.), siégeant à la fois sur l’aorte thoracique et abdominale, simultanément ou non.

L’évolution des anévrysmes aortiques n’est souvent pas parallèle à celle des manifestations extravasculaires. En effet, alors même que la maladie semble en rémission, les lésions vasculaires peuvent continuer à progresser de façon indépendante. Notre observation illustre bien cela, car l’anévrysme aortique est survenu malgré la rémission obtenue sur le plan extravasculaire par la colchicine.

Les anévrysmes aortiques sont des complications rares mais gravissimes de la PCA dont la survenue est indépendante de l’évolution des chondrites ou des autres manifestations extravasculaires.