Faut-il proposer systématiquement un délai de réflexion au patient avant une intervention en chirurgie orthopédique ? Étude prospective à propos de 52 patients - 20/06/19
Should we routinely offer a period of reflection to the patient before an intervention in orthopaedic surgery ? A prospective study on 52 patients
RÉSUMÉ |
Le Code de la Santé Publique n’impose pas, de façon explicite, un délai de réflexion au patient, pour qu’il puisse prendre une décision de façon sereine en dehors de la chirurgie esthétique où le délai de réflexion (Art. L. 6322-2 du Code de la Santé Publique) est de quinze jours. La première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 11 mars 2010 (pourvoi no 09-11270) vient de rappeler cependant qu’il incombait au chirurgien, de laisser un temps de réflexion « adapté » au patient.
Le but de ce travail est d’analyser la notion de « délai de réflexion ». 52 patients ont été inclus entre le 1er janvier 2014 et le 1er mars 2014. Tous ces patients devaient bénéficier d’une intervention de chirurgie orthopédique programmée (urgence exclue).
Les données étaient recueillies par deux questionnaires, prospectifs, observationnels, monocentriques, en entretien semi dirigé par deux membres de l’équipe médicale avant et après l’intervention.
Chaque questionnaire comportait 10 questions à choix multiples. Le patient pouvait à tout moment changer de réponse. L’entretien a été effectué la veille de l’intervention et le jour de la sortie.
L’âge moyen est de 56,5 ans. 26 patients ont bénéficié d’une chirurgie prothétique (hanche, genou, épaule), 21 patients d’une chirurgie correctrice de l’avant pied ou d’une arthroscopie de genou ou d’épaule, 5 patients d’une chirurgie de retrait de matériel. Tous ces patients étaient pris en charge en « hospitalisation classique » (ambulatoire exclu).
92 % des patients considèrent que le chirurgien est la principale personne qui a participé à la démarche décisionnelle. Avant l’intervention, 75 % des patients n’ont pas ressenti le besoin de définir un délai de réflexion avant de prendre leur décision. Après l’intervention, seulement 6 % des patients regrettent de ne pas avoir défini un délai de réflexion. Chez les patients ayant défini un délai de réflexion, 56 % ont jugé que ce dernier était trop court. Enfin les patients ne sont pas en faveur d’un délai de réflexion obligatoire (OR = 1, 18 IC à 95 % [0,3373-4,1349], p-value = 1).
La perception du délai de réflexion par les patients est discordante. Les patients sont attachés et adhèrent à la relation de confiance avec leur chirurgien dans leur choix décisionnel. Ils ne sont pas en faveur d’un délai « imposé ».
La notion de délai de réflexion (dans l’exercice de la chirurgie orthopédique programmée) est à la fois un concept éthique et jurisprudentiel. Cette étude prospective, montre que la notion de « délai de réflexion » n’obère ni la relation éthique de confiance patient-chirurgien, ni a posteriori, c’est à dire après la réalisation de l’intervention, la réflexion décisionnelle du patient.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.SUMMARY |
The French Public Health Code does not explicitly mention giving a period of reflection to the patient, so that he can make a serene decision, except for cosmetic surgery where the reflection period (Art. L. Cosmetic Surgery 6322 ¢2 of the Code of Public Health) shall be fifteen days. The First Civil Chamber of the Supreme Court, in a judgment of March 11, 2010 (appeal No. 09-11270) has admonished that the surgeon has to give a time for reflection suitable for a particular patient.
To assess the needed period of reflection, 52 patients were enrolled between January 1, 2014 and March 1, 2014. All patients were to receive a scheduled (non-emergency) orthopaedic surgery.
Data were collected by two prospective, observational, single-centre questionnaires and semi-directed interviews by two members of the medical team before and after the intervention maintenance.
Each questionnaire consisted of 10 multiple choice questions. The patient could at any time change response. The interviews were conducted the day before surgery and the day of the release.
The average age was 56, 5 years. 26 patients had a prosthetic surgery (hip, knee, shoulder). 21 patients underwent corrective surgery of the forefoot or arthroscopic knee or shoulder. All patients were hospitalized in the traditional fashion (excluding outpatient). 5 patients had surgery for removal of osteosynthesis material.
92 % of patients have praised their surgeon as the main person who was involved in their decision to operate. Before the intervention, 75 % of patients did not need to define a period of reflection before confirming their decision. After surgery, only 6 % of patients regret not having defined period of reflection. In patients with a defined period of reflection, 56 % (p <0.01) felt that it was too short. Most of the patients are not in favour of a mandatory cooling period (OR = 1, 18 IC 95 % [0, 3373-4, 1349] — p-value = 1).
The assessment of the reflection period by patients is unfavorable. Patients are attached and adhere to the relationship of trust with their surgeon in their decision choice. They are not in favour of a period “ imposed “.
The concept of reflection period (in the exercise of the programmed orthopaedic surgery) is both an ethical and jurisprudential concept. In this prospective study, it appears that the concept of “ thinking time “ in scheduled orthopaedic surgery hampers neither the ethical patient-surgeon relationship of trust, nor the a posteriori, i.e. after completion of the intervention, decision-reflection patient.
Le texte complet de cet article est disponible en PDF.Mots-clés : Orthopédie, Délai jusqu’au traitement, Relations médecin-patient
Key-words : Orthopedics, Time-to-Treatment, Physician-Patient Relations
Plan
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêt en relation avec le contenu de cet article. Tirés à part : Professeur Henry Coudane, même adresse |
Vol 200 - N° 4-5
P. 943-952 - avril 2016 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.