Gestion des antithrombotiques dans la cardiopathie ischémique chez le patient porteur d’un trouble de l’hémostase constitutionnel : expérience du centre régional d’hémophilie de Toulouse - 28/11/18
Résumé |
Introduction |
Du fait de l’augmentation de leur espérance de vie, les patients porteurs d’une hémophilie A (HA), B (HB) ou d’une maladie de von Willebrand (MvW) sont confrontés à la survenue de cardiopathie ischémique. Leur prise en charge est une situation à haut risque hémorragique, mais aussi thrombotique par la substitution en facteurs de la coagulation. L’interniste est de plus en plus sollicité pour prendre en charge ces risques contraires.
L’objectif de notre étude était de décrire la prise en charge thérapeutique dans la cardiopathie ischémique chez les patients adultes atteints d’une HA, HB ou MvW suivis au Centre Régional d’Hémophilie (CRH) de Toulouse, et d’en évaluer la sécurité et l’efficacité.
Matériels et méthodes |
La source de notre population était la cohorte de patients porteurs d’une HA (n=565), HB (n=115) ou MvW (n=618) suivis au CRH de Toulouse. Nous avons rétrospectivement identifié et décrit par lecture des dossiers médicaux les patients porteurs d’une cardiopathie ischémique et traité par antithrombotique. Le terme cardiopathie ischémique recouvrait les situations suivantes : syndrome coronarien aigu sans et avec sus-décalage du segment ST, angor stable et instable, et coronaropathie silencieuse. Nous avons décrit les stratégies de revascularisation, l’utilisation des AAP et la survenue de complications hémorragiques ou thrombotiques lors du suivi.
Résultats |
Huit patients ont présenté une cardiopathie ischémique, âgés de 49 à 80 ans, dont sept hommes. Cinq étaient suivis pour une HA, 1 pour une HB et 2 pour une MvW (un type 1 et un type 2B). Les principaux facteurs de risque cardiovasculaires étaient le surpoids (n=5), l’hypercholestérolémie (n=4) et le tabagisme actif (n=4). La cardiopathie ischémique a été diagnostiquée soit sur des symptômes d’appels (n=3), soit dans le cadre d’un dépistage (n=5). Quatre patients ont été pris en charge par triple pontage coronarien et 4 par angioplastie. Les patients traités médicalement ont reçu une double anti-agrégation plaquettaire pendant un mois, puis de l’acide acétylsalicylique au long cours. Les patients traités chirurgicalement étaient traités par acide acétylsalicylique seul. La moyenne des Journées Cumulées de Présence de l’Antigène (JCPA) était inférieure chez les patients traités médicalement (13±10,42 JCPA) que chez ceux traités chirurgicalement (19±9,35 JCPA).
Quatre patients ont été pris en charge avec des écarts par rapport aux recommandations d’expert actuelles [1 , 2 , 3 ] :.
– la patiente avec une MvW de type 2B a reçu un stent actif tandis que les avis d’experts recommandent l’utilisation de stent nu. Une double anti-agrégation plaquettaire a donc été débutée, mais stoppée un mois plus tard en raison d’une anémie microcytaire. Un relais a été fait par acide acétylsalicylique à la dose de 160mg/J au lieu de 75mg/J. La patiente a présenté une hémorragie digestive sévère un an plus tard ;
– un patient porteur d’une HB mineure (FIX 34 %), n’a pas reçu de traitement substitutif lors de l’angioplastie coronarienne ni d’inhibiteur de la pompe à protons sous AAP. Il n’a néanmoins présenté aucune complication hémorragique ;
– un patient atteint d’HA modérée (FVIII 6 %) avait un FVIII résiduel en dessous du seuil recommandé 7jours après le triple pontage coronarien (37 % vs.>50 %). Il a présenté brutalement à j8 de la chirurgie une tamponnade hémorragique ;
– Enfin, un patient suivi pour une HA modérée n’a pas reçu d’AAP au long cours après un triple pontage coronarien. Cependant, il n’a présenté aucun nouvel évènement cardiovasculaire durant les 4 années qui suivirent.
Durant le suivi (médiane : 24,5 mois), un seul patient (91 ans, HA, FVIII 20 %) a présenté un nouvel évènement cardiovasculaire : une artériopathie oblitérante des membres inférieures de stade III, 11 ans après le triple pontage coronarien. À l’inverse, 3 patients ont expérimenté une hémorragie grave tandis qu’ils étaient traités par AAP : un hémopéricarde et l’hémorragie digestive déjà décrits, et un saignement intracrânien post-traumatique à respectivement, j7 post opératoire, 13 mois et 11 ans après l’évènement cardiaque ischémique.
Conclusion |
Cette série de 8 patients confirme le risque important de complications hémorragiques graves lorsqu’un traitement de cardiopathie ischémique est débuté chez le patient porteur d’une hémophilie ou d’une MvW. Un des trois cas de complications hémorragiques graves est survenu à distance sous acide acétylsalicylique, et malgré un respect strict des recommandations d’expert.
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Vol 39 - N° S2
P. A49-A50 - décembre 2018 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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