Syndrome de Willebrand acquis et lymphome splénique : réponse spectaculaire à la corticothérapie - 23/11/17
Résumé |
Introduction |
Le syndrome de Willebrand acquis (aVWS) est rare (300 à 500 cas dans la littérature) et a été décrit pour la première fois en 1968 au cours d’un lupus érythémateux disséminé. Cliniquement et biologiquement superposable à la forme héréditaire de la maladie, la forme acquise débute à un âge plus avancé, en rapport avec les pathologies responsables. Celles-ci sont variées, dominées par les causes hématologiques (syndromes lymphoprolifératifs (50 % des cas rapportés) et myéloprolifératifs), les maladies auto-immunes (LED, sclérodermie) et des atteintes cardiaques (sténose aortique).
Observation |
Nous rapportons le cas d’un patient de 70 ans, adressé pour l’exploration d’une pancytopénie avec splénomégalie. Deux ans auparavant, le patient avait présenté un purpura ecchymotique extensif révélateur d’une thrombopénie avec anémie et lymphopénie, traitées par corticoïdes. Il existait alors une splénomégalie concomitante qui n’avait pas été explorée davantage devant la régression de tous les symptômes sous corticothérapie. Le patient présente une récidive des mêmes symptômes, avec une rate mesurée à plus de 20cm. Au bilan d’admission, des troubles de l’hémostase sont constatés : un TCA allongé (avec un ratio à 2), non connu, conduit à la découverte d’un syndrome de Willebrand. Le facteur VIII est abaissé à 10 % avec une recherche d’inhibiteur négative, l’activité cofacteur de la ristocétine est effondrée <10 %, l’antigène de Willebrand (=facteur de Willebrand VWF) est mesuré à 10 %. Aux vues de l’absence d’antécédent hémorragique personnel et familiaux, et de la normalité des examens d’hémostase précédente, une étiologie acquise est privilégiée. La recherche d’auto-anticorps anti-VWF par méthode ELISA est négative. Le bilan étiologique s’oriente vers une forte suspicion de lymphome splénique (fixation intense au PET-scanner). Afin d’encadrer le geste de splénectomie, des tests thérapeutiques sont organisés : le test à la desmopressine est négatif, le test cinétique au VWF humain (Willfactin) montre que celui-ci rechute à 10 % moins de 4h après injection du produit, signant une récupération médiocre. Une corticothérapie à 1mg/kg/j est alors décidée, malgré l’absence d’anticorps. En 72h, le VWF monte à 40 %, jusqu’à se normaliser après 1 semaine de traitement, comme les cytopénies. Cette corticosensibilité permet de réaliser la splénectomie diagnostique sans substitution particulière, et le geste chirurgical se déroule sans complication au décours. L’anatomopathologie montre une infiltration par des petites cellules lymphoïdes B évoquant un lymphome B de la zone marginale splénique. Cette intervention a été thérapeutique, le patient ne présentant plus de syndrome de Willebrand dans les suites, avec arrêt de la corticothérapie.
Discussion |
Schématiquement, trois grands mécanismes pathogéniques sont décrits dans le syndrome de Willebrand acquis : présence d’auto-anticorps anti-VWF, inhibiteurs ou non (neutralisant son activité ou accélérant sa clairance) ; absorption sélective sur les clones de cellules malignes ou plaquettes activées (1–2) ; protéolyse excessive des multimères du VWF de haut poids moléculaire dans des conditions hémorhéologiques anormales créées par des malformations cardiovasculaires. Nous sommes en présence ici d’un aVWS, par absorption sélective des cellules lymphomateuses spléniques. L’originalité de ce cas réside en sa réponse spectaculaire aux corticoïdes, alors que celle-ci est surtout décrite pour les mécanismes immuno-médiés avec anticorps anti-VWF. Elle a permis de se passer de la thérapie substitutive par Willfactin, le traitement de référence, que nous aurions du mettre à forte dose devant la récupération médiocre du VWF. Dans la littérature, les cas de aVWS liés aux LNH sont uniquement traités par chimiothérapie. La corticosensibilité est probablement liée à la présence d’un lymphome de bas grade, permettant de contrôler les risques hémorragiques, avant le traitement curatif par splénectomie.
Conclusion |
Des troubles de l’hémostase associés à une maladie lymphoproliférative doivent nous faire évoquer un syndrome de Willebrand acquis. Une fois diagnostiqué, des tests thérapeutiques sont réalisés pour traiter et prévenir les complications hémorragiques. La corticothérapie est un élément précieux de l’arsenal thérapeutique, d’autant plus lorsque les principaux tests sont négatifs ou très médiocres. Le traitement principal reste celui de la cause.
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Vol 38 - N° S2
P. A215-A216 - décembre 2017 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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