Céphalées révélatrices d’un syndrome de Morgagni-Stewart-Morel : une observation - 23/11/17
Résumé |
Introduction |
En plus des complications métaboliques bien connues, l’obésité morbide peut se compliquer au plan neurologique (accidents vasculaires, hypotension intracrânienne bénigne…). En cas de céphalées, une entité, de diagnostic facile et dont nous rapportons une observation, mérite d’être connue : le syndrome de Morgagni-Stewart-Morel.
Observation |
Une femme de 59 ans consultait en raison de céphalées chroniques, d’une hémiparésie gauche non proportionnelle et d’une pseudo-sciatalgie gauche. Elle rapportait une obésité morbide traitée par sleeve gastrectomy en avril 2014, une HTA, une dyslipidémie, un syndrome des apnées du sommeil, une ovariectomie bilatérale subtotale à l’âge de 20 ans, chez une 2° geste, 2° pare, ménopausée à l’âge de 38 ans, non-substituée. L’examen clinique et les examens biologiques de débrouillage étaient normaux. Le scanner cérébral montrait une hyperostose frontale bilatérale prédominant à droite. L’IRM témoignait d’une leucopathie vasculaire en axial FLAIR et du caractère condensant de l’hyperostose frontale en T1 brain. La scintigraphie osseuse montrait une hyperfixation frontale diffuse et franche, faisant évoquer une maladie de Paget. La patiente ne présentait pas d’hypertrophie des bosses frontales, les marqueurs du remodelage osseux (incluant CTX sériques et urinaires) étaient normaux en l’absence de dysglobulinémie. Le TEP scanner était normal. Par élimination, le diagnostic de syndrome de Morgagni-Stewart-Morel était retenu.
Discussion |
Le syndrome de Morgagni-Stewart-Morel (hyperostosis frontalis interna [HFI]) est une hyperostose frontale concernant exclusivement la table interne, épargnant constamment la diploë et la table externe, uni- ou bilatérale, faite d’un ou plusieurs nodules. Sa prévalence est évaluée sur des séries autopsiques à 12 %, touchant surtout les femmes, et augmentant avec l’âge. Sa découverte est souvent incidentelle, soit isolément, soit associé à des états morbides. Sa sévérité est actuellement appréciée par la classification anatomique de Hershkowitz (1999), de A à E, les formes symptomatiques étant souvent l’apanage des grades D (nodules contigus occupant plus de 50 % de l’os frontal) et E (HFI sévère comprimant les tissus de voisinage). Fréquemment asymptomatique, cette hyperostose peut donner lieu à un syndrome frontal, des céphalées, une épilepsie, des troubles cognitifs ou des manifestations psychiatriques. Dans les formes les plus graves, elle peut être responsable d’une atrophie corticale fronto-insulaire, de désordres métaboliques (diabète, obésité), d’endocrinopathies (dysthyroïdies, hirsutisme), d’ostéoporose et d’une petite taille. Le diagnostic repose sur l’imagerie. Les hypothèses physiopathologiques sont aidées par l’anthropologie, cette anomalie ayant été retrouvée au Nouveau-Mexique et en Syrie chez des femmes, avec ménarche précoce, pauciparité et ménopause tardive, rompues à la diététique « tribale » riche en phyto-œstrogènes et aux apports caloriques élevés. L’imputabilité des œstrogènes est discutée, de même que le rôle de l’obésité et de la down-regulation hypothalamique de l’action de la leptine qui favoriserait l’ostéoformation (cf. notre observation). C’est probablement pour cette raison que ce syndrome est rare chez l’homme, sauf en cas d’hypogonadisme : farinelli, célèbre castrat, en était atteint, de même que certains patients bénéficiant d’un blocage androgénique pour une néoplasie prostatique. Aucune donnée n’est disponible à ce jour sur l’évolution de ce syndrome après chirurgie bariatrique.
Conclusion |
L’obésité morbide peut se compliquer d’hyperostose frontale interne. Le rôle de la chirurgie bariatrique sur la progression, voire la régression de cette anomalie, reste inconnu et mériterait d’être précisé.
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Vol 38 - N° S2
P. A209-A210 - décembre 2017 Retour au numéroBienvenue sur EM-consulte, la référence des professionnels de santé.
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