Il existe en France des inégalités géographiques et sociales de mortalité précoce par cardiopathies ischémiques. L'objectif de cette étude est d'expliquer cette hétérogénéité par la distribution de facteurs de risque connus (style de vie et morbidité).

Une étude par régression écologique a été menée. Les unités statistiques étaient représentées par le croisement des 94 départements français avec la classe d'âge (30[shy]59 ans en classes de 10 ans) et la catégorie socioprofessionnelle (5 des 6 classes initiales) chez les hommes, entre 1986 et 1995.

Les données de mortalité par cardiopathies ischémiques (codes 410 à 414 de la CIM 9) ont été obtenues auprès de l'INSERM, à partir des certificats de décès. La prévalence de l'obésité, des dyslipidémies, de l'hypertension, des consommations d'alcool et de tabac en France sont issues de l'Enquête nationale sur la santé et les soins médicaux de 1991[shy]92. Les données alimentaires ont été obtenues à partir de l'enquête de consommation alimentaire des ménages de 1991, sous forme de pourcentage de consommation élevée de fruits, de légumes, de viande et de beurre.

Un modèle de Poisson, prenant en compte la corrélation spatiale des données par modélisation de l'erreur résiduelle (modèle conditionnel autoregressif) a été utilisé. Les paramètres ont été estimés par approche bayésienne par la méthode des chaînes de Markov Monte[shy]Carlo.

Les régions du quart nord[shy]est de la France présentent, d'une part, les taux de mortalité par cardiopathies ischémiques les plus élevés et, d'autre part, une accumulation des facteurs de risque. Les risques relatifs associés aux différentes variables dans le modèle terminal retenu sont respectivement de 1,35 (IC _{95 %} = [1,27[shy]1,43]) et 1,02 (IC _{95 %} = [0,98[shy]1,06]) pour une consommation tabagique importante et une non[shy]consommation d'alcool, de 0,86 (IC _{95 %} = [0,80[shy]0,94]), 1,10 (IC _{95 %} = [0,98[shy]1,22]), 1,38 [1,24[shy]1,54] et 1,13 [1,02[shy]1,26] pour une consommation élevée de fruits, de légumes, de viande et de beurre, de 0,99 (IC _{95 %} = [0,84[shy]1,16]) et 1,12 (IC _{95 %} = [1,05[shy]1,20]) pour l'obésité et la dyslipidémie. La surmortalité initialement observée dans le quart nord[shy]est disparaît après prise en compte des facteurs de risque.

Cette étude écologique présente certaines limites liées à la méthode et à la qualité des données. Néanmoins l'effet important sur les cardiopathies ischémiques de variables de style de vie et de morbidité a été retrouvé. De plus, des implications en termes de programmes de prévention en santé publique pourraient en découler.