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Peut-on arrêter l’anticoagulation au cours du traitement de la thrombose veineuse cérébrale associée à la maladie de Behçet ? Série de six patients - 26/05/16

Doi : 10.1016/j.revmed.2016.04.268 
M. Roriz 1, , C. Isabelle 2, S. Lechtman 1, D. Saadoun 3, C. Karine 1, B. Wechsler 4, H. Chabriat 2, D. Sène 1
1 Médecine interne, hôpital Lariboisière, Paris, France 
2 Neurologie, hôpital Lariboisière, Paris, France 
3 Service de médecine interne 2, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris, France 
4 Médecine interne, hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris, France 

Auteur correspondant.

Résumé

Introduction

La maladie de Behçet est une vascularite systémique rare pouvant atteindre les vaisseaux artériels ou veineux de calibre différent. L’atteinte neurologique est retrouvée dans 10 % des cas et la thrombose veineuse cérébrale est la plus fréquente des formes extra-parenchymateuses. L’utilisation et la durée du traitement anticoagulant dans la thrombose veineuse cérébrale ne sont pas consensuelles. Il en est de même du devenir du traitement anticoagulant quand il est instauré. Nous rapportons 6 cas de thrombose veineuse cérébrale associées à une maladie de Behçet pour lesquelles le traitement anticoagulant a été arrêté sans récidive de thrombose veineuse.

Patients et méthodes

Vingt cas de maladie de Behçet associées à une maladie de Behçet ont été recensés entre 2000 et 2014 de façon rétrospective dans un centre hospitalo-universitaire. Le traitement anticoagulant a été interrompu pour 6 d’entre eux (30 %), par choix du clinicien. Pour ces patients, nous avons analysé les données cliniques, biologiques et morphologiques ayant permis le diagnostic de thrombose veineuse cérébrale, les circonstances de l’arrêt du traitement anticoagulant et leur devenir.

Résultats

Le diagnostic de thrombose veineuse cérébrale précédait celui de maladie de Behçet chez les 6 patients (sex ratio H/F : 5/1), avec un âge moyen au moment du diagnostic de thrombose veineuse cérébrale de 25,8ans [15–33]. Un facteur favorisant de thrombose veineuse était retrouvé chez 5 patients : tabagisme (n=2), œstroprogestatif (n=3) et contexte postopératoire (n=1). Le délai moyen entre le début des symptômes et le diagnostic de thrombose veineuse cérébrale était de 16,6jours [3–34]. Les signes cliniques et biologiques révélateurs comprenaient : des céphalées isolées (n=6), de la fièvre, un syndrome inflammatoire (n=5) avec une concentration de protéine c-réactive en moyenne de 56mg/L [22–219] et une élévation des D-dimères avec un taux moyen de 931ng/mL [50–2480]. Le diagnostic de thrombose veineuse cérébrale était posé sur une IRMc, avec thrombose de plus d’un sinus dans 5 cas. Les thromboses veineuses cérébrales étaient localisées le plus souvent dans le sinus sagittal supérieur (6 cas) et les sinus latéraux (6 cas). Aucune thrombose du système veineux profond, des veines corticales, ou de localisation extra-neurologique ni infarctus veineux n’étaient constatés. Un comblement des cellules mastoïdiennes sur l’IRM cérébrale était signalé chez 3 patients. Tous les patients ont reçu un traitement par héparine, puis par anti-vitamine K. Aucun patient ne recevait de colchicine, ni corticoïdes, ni d’immunosuppresseurs au diagnostic de la thrombose veineuse cérébrale. Le diagnostic de maladie de Behçet a été évoqué chez 4 patients du fait d’une évolution atypique : HTIC persistante malgré une anticoagulation efficace et nécessitant des ponctions lombaires évacuatrices (n=2) ou une extension de la thrombose veineuse cérébrale sous anticoagulant (n=3). Il a été posé au cours du suivi, en moyenne 145jours [40–400] après le diagnostic de thrombose veineuse cérébrale. L’ensemble des patients présentait une atteinte cutanéo-muqueuse (100 % d’aphtose buccale, 30 % d’aphtose génitale). Aucune atteinte ophtalmologique, vasculaire ou neurologique parenchymateuse n’était notée. Une seule patiente avait un antécédent d’embolie pulmonaire en post partum 3ans auparavant. Le typage HLA B51 était retrouvé chez 3 patients. Une fois le diagnostic de maladie de Behçet posé, les patients recevaient de la colchicine (n=6), des corticostéroïdes (n=5) et de l’azathioprine (n=5). Un seul patient avait rechuté au cours du suivi, sous la forme d’une méningite lymphocytaire sans récidive de thrombose veineuse cérébrale. Le traitement anticoagulant avait été poursuivi pour une durée moyenne de 28 mois [18–37], puis relayé par un traitement par antiagrégant chez 5 patients. La dose moyenne de corticoïde était de 10mg, d’azathioprine de 100mg et de colchicine de 1mg. Une reperméabilisation complète des sinus thrombosés était observée chez 4 patients (dès la première année pour 3 d’entre eux). Avec un suivi moyen de 90 mois [41–185], aucune récidive de thrombose veineuse cérébrale, de thrombose veineuse ou artérielle d’autre localisation n’était rapportée.

Conclusions

Nous rapportons une série de 6 patients avec thrombose veineuse cérébrale dans le contexte d’une maladie de Behçet, pour lesquels le traitement par anti-vitamine K a été interrompu et relayé par un traitement antiagrégant sans récidive thrombotique. Associées à l’absence de démonstration consensuelle de l’anticoagulation dans les thromboses veineuses associées à la maladie de Behçet, ces données suggèrent que l’arrêt de l’anticoagulation dans la thrombose veineuse cérébrale sous réserve d’une maladie de Behçet bien contrôlée par corticoïdes et immunosuppresseurs, est envisageable, avec ou sans reperméabilisation des sinus thrombosés, sans risque de récidive de thrombose.

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Vol 37 - N° S1

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