Nous rapportons le premier cas décrit dans la littérature de syndrome de Lyell secondaire à la prise d’acide fusidique oral, d’évolution rapidement fatale.

Une femme de 82ans était adressée en urgence pour décollement cutané étendu. L’examen clinique trouvait une fièvre à 39°C, des ulcérations buccales et oculaires, un décollement épidermique de plus de 70 % de la surface corporelle avec signe de Nikolsky positif, permettant de poser le diagnostic de syndrome de Lyell. L’histologie cutanée confirmait le diagnostic avec un aspect de nécrose épidermique totale. L’historique médicamenteux mettait en évidence la prise récente d’une antibiothérapie orale par acide fusidique (Fucidine^®), introduite douze jours auparavant pour une escarre chronique sacrée. Aucun autre traitement n’avait été introduit dans les mois précédant l’éruption. L’évolution était rapidement fatale en 24heures.

L’acide fusidique est essentiellement connu des dermatologues sous forme de topique pour le traitement des surinfections staphylococciques cutanées. Son utilisation par voie orale est plus rare, indiquée dans des infections staphylococciques cutanées, osseuses ou articulaires. Il s’agit ici du premier cas décrit dans la littérature de syndrome de Lyell à l’acide fusidique oral. La base nationale de pharmacovigilance rapporte deux autres cas pour lesquels l’acide fusidique oral pourrait être imputable. Dans notre observation, l’indication de ce traitement était discutable. En effet, d’après la conférence de consensus sur la prise en charge des escarres, l’antibiothérapie ne se justifie qu’en cas de signe de surinfection. Par ailleurs, l’acide fusidique n’est pas l’antibiotique recommandé en première intention (nombre croissant de résistances).

L’acide fusidique doit être considéré comme un pourvoyeur potentiel de toxidermie grave, et notamment de nécrolyse épidermique toxique. Comme pour tout traitement, son indication doit être réfléchie et se fonder sur les recommandations de bonne pratique.